Publié le : 13 octobre 2013
Source : bvoltaire.fr
Le système a trouvé sa star du moment. Bien joué, France 2, bien joué, David Pujadas. Dans l’émission de jeudi « Des paroles et des actes », Jean-François Copé était l’invité du jour. Soirée sans grand intérêt, comme prévu, durant laquelle le putschiste du pauvre a évidemment martelé que Hollande est nul et que, lui au pouvoir, ça irait beaucoup mieux. Hyper crédible pour un apparatchik dont le parti a régné dix années d’affilée en ruinant le pays comme jamais.
Et soudain, la seule étincelle du programme. Celle qui fait le buzz depuis deux jours. Le tournant du scénario, le micro-clash annoncé. Isabelle Maurer apparaît à l’écran. Au bout de deux secondes, Copé a compris le traquenard !
En face de lui, c’est un moulin à paroles. Une sorte de mère Denis de l’an 2013. Avec l’accent, elle parle franco, mais ne balance qu’une suite de lapalissades discount. En gros : « Si on donnait du boulot à tout le monde, ça irait mieux » ; « moi, je voterai un jour pour une personne qui se lève à six heures du matin », etc.
Elle s’appelle Isabelle Maurer, de Mulhouse. Une mère chômeuse qui « en a marre », qui bouscule Copé, lequel, en vieux roublard, la boucle bien sagement. Elle veut être le nouveau Coluche, rien que ça. Le politicard UMP joue la montre, laisse passer l’orage. Vaut mieux !
Parce qu’en face, ça débite. En plus, c’est ridicule. La mère de famille n’est pas sur le plateau mais… juste à côté. Mise en scène cousue de fil blanc puisqu’elle avoue qu’elle a fait le déplacement. Quand Pujadas donne le clap de fin, il ne restera que la « passe d’armes ».
Les réseaux sociaux s’emballent. Elle a déjà des « fans ». Dès le lendemain (comme quoi l’opération est bien huilée), on l’invite dans le Grand Journal de Canal. Les chroniqueurs, le présentateur, les autres invités la regardent un peu comme on regardait la femme à barbe dans les fêtes foraines de jadis. Curiosité prudente mêlée à une sympathie de bonne sœur. Anne Lauvergeon veut la recruter en direct. Les regards d’Antoine de Caunes en disent long. Il faut lui clouer le bec car la pub arrive ! Oui, Isabelle Maurer est leur bête de foire. Pour une fois, on peut être d’accord avec Bruno Roger-Petit qui, dans un excellent article, parle de « télé de l’ignoble » dans Le Nouvel Obs.
L’équipe de Copé l’accuse d’être politisée : « Madame Maurer n’est pas une militante », dit Pujadas, qui avoue quand même l’avoir ni plus ni moins castée (elle apparaissait déjà dans le reportage d’un précédent JT ). Jean-Michel Apathie pose la question qui lui brûle les lèvres : « Pour qui avez-vous voté au premier tour en 2012 ? » Madame Maurer répond : « Je ne vous le dirai pas. »
Si on avait voulu disqualifier la parole du peuple, on n’aurait pas fait mieux. Les « zélites », les « Pujadas » de toujours, savent que le peuple gronde fort. Il faut le montrer avec le visage de madame Maurer. Ça fait zoo, ça rassure. Ça semble ridicule et lointain.
Les salauds ont toujours aimé les bêtes de foire. Pour jouer à s’effrayer, un peu.
Joris Karl
