Publié le : 28 mai 2012
Source : silviacattori.net
En réponse à la déclaration des Nations Unies concernant le massacre d’al-Houla
Texte intégral de la conférence de presse au cours de laquelle l’ambassadeur de Syrie à l’ONU, Bachar Al-Jaafari, a dénoncé « le tsunami de mensonges qui ont été dits il y a quelques minutes par certains membres du Conseil. »
transcrit [1] et traduit de l’anglais par JPH pour silviacattori.net
En Syrie il y a eu un crime épouvantable, horrible, injustifié, et injustifiable. Ce massacre a été condamné par mon gouvernement dans les termes les plus forts. Et sur ce point, la version de la condamnation de mon gouvernement a rejoint exactement la formulation adoptée il y a quelques minutes par le Conseil de Sécurité.
Je voudrais également condamner ici, au nom de mon gouvernement, le tsunami de mensonges qui ont été dits, il y a quelques minutes, par certains membres du Conseil qui ont tenté de vous induire en erreur en disant que leur manière de lancer des accusations contre mon gouvernement était basée sur ce qu’ils ont affirmé être des « preuves ». Ils ont tort et ils vous induisent en erreur. Ni le Général Mood, ni qui que ce soit d’autre n’a dit au Conseil de Sécurité et à la session informelle qu’il blâmait les forces du gouvernement syrien pour ce qui est arrivé. Il est vraiment pitoyable et regrettable que certains membres du Conseil soient sortis -quelques minutes après que le Général Mood ait terminé son exposé- pour vous induire en erreur et vous dire des mensonges sur ce qui s’est passé.
Je vous invite tous à regarder ce qui s’est passé à al-Houla dans son intégralité. Dans ce tableau complet, ce qui s’est passé hier al-Houla se situe dans un contexte que nous devons comprendre pour saisir et comprendre qui a perpétré ce crime.
Hier, après la prière du vendredi, deux cents à trois cents hommes armés se sont réunis vers deux heures de l’après-midi. Ils se sont réunis en fait en plusieurs points, et ensuite ils se sont déplacés pour se regrouper en un seul endroit, à al-Houla. Ils avaient des voitures pick-up chargées d’armes lourdes comme des missiles anti-chars, des mortiers et des mitrailleuses, à la manière libyenne que vous avez pu voir il y a quelques mois, et ils ont commencé à attaquer les forces de l’ordre qui étaient positionnées dans la région en cinq endroits différents ; les attaques armées ont duré de deux heures de l’après-midi jusqu’à onze heures du soir.
Donc, ici, nous ne parlons pas d’une attaque armée qui aurait eu lieu et se serait terminée en une demie heure. Il s’agit d’une opération armée d’envergure planifiée à l’avance avec de nombreux objectifs. Après avoir attaqué les positions des forces de l’ordre, les groupes armés se sont tournés vers les civils, puis ils se sont rendus dans un autre village qui est tout proche d’al-Houla, à une distance d’un kilomètre, où ils ont brûlé l’hôpital national, ils ont brûlé les récoltes des agriculteurs et ils ont brûlé des maisons. Ils ont aussi tué des dizaines de civils innocents dans un autre village, également proche d’al-Houla, appelé Shomaria. Donc, ici, nous ne parlons pas d’un seul incident qui aurait eu lieu dans un endroit précis, nous parlons d’un théâtre d’opérations qui a englobé beaucoup de petits villages de la région.
Mon gouvernement a nommé une Commission nationale d’enquête qui a pour mission de découvrir qui sont les auteurs de cet horrible massacre afin qu’ils soient traduits en justice. Ceux qui ont commis ce crime en seront tenus responsables par les autorités syriennes, devant la loi de notre pays.
Le communiqué de presse adopté aujourd’hui par le Conseil de Sécurité, a adopté en quelque sorte la version des évènements présentée par le Général Mood. Si vous regardez la formulation du communiqué de presse, vous constaterez que rien n’indique que le Conseil rejette le blâme sur les forces du gouvernement syrien pour les meurtres et la perpétration des massacres. Au contraire il identifie d’autres éléments dans ce tableau qui peuvent être responsables de ce qui s’est passé. Je dis cela parce que le communiqué de presse dit que le Conseil de Sécurité condamne dans les termes les plus forts les meurtres confirmés par les observateurs des Nations Unies. Je confirme également ici au nom de mon gouvernement que des dizaines de civils ont été tués, cent quatorze – et ensuite une attaque qui a impliqué des tirs d’artillerie et de chars sur un quartier résidentiel.
Ensuite, les membres du Conseil de Sécurité ont également condamné le meurtre de civils par des tirs à bout portant et par de graves violences physiques. La plupart des meurtres qui ont eu lieu à al-Houla sont dûs à ce genre d’assassinats, des gens tués à bout portant, et non en raison des tirs d’artillerie, car des tirs d’artillerie n’auraient pas laissé les corps des victimes dans l’état où vous les avez vus. Nous parlons ici du style de meurtres qu’a connu l’Algérie au début des années nonante.
Mon gouvernement ne ménagera aucun effort, quels qu’ils soient, afin de trouver les auteurs de ces massacres, et de les traduire en justice.
Je voudrais ajouter à cela, que le Conseil de Sécurité devrait se réunir également pour identifier ceux qui arment les groupes terroristes en Syrie, qui les accueillent, qui les suscitent et les incitent à la violence, et qui les protègent, et appeler à ce qu’ils soient également traduits en justice. Certains membres du Conseil, leurs fonctionnaires l’ont dit publiquement. Certains d’entre eux sont des membres permanents. Leurs hauts fonctionnaires ont dit publiquement qu’ils ne ménageraient pas leurs efforts pour fournir des armes à l’opposition syrienne, et certains d’entre eux ont parlé d’ « armes non-létales », je ne sais pas ce que cela signifie. Mais le résultat immédiat de cette militarisation de l’opposition s’est traduit sous la forme de l’enlèvement des pèlerins libanais revenant d’Irak au travers du territoire turc, et sous la forme d’attentats-suicides et de l’infiltration du territoire syrien par al-Quaida.
Nous n’avons donc pas besoin d’un double langage au Conseil de Sécurité. Nous devons tenir chacun responsable devant la justice, même si nous touchons à certains membres permanents. Ceux qui disent avoir grand intérêt à arrêter la violence et à la réussite du dialogue national en Syrie devraient cesser de s’ingérer dans nos affaires intérieures, cesser d’armer, d’héberger, de financer et de protéger les groupes terroristes armés dans mon pays. On ne peut pas être en même temps pyromane et pompier. Et Malheureusement, c’est exactement le cas de certains membres de ce Conseil de Sécurité. Les dimensions arabe, régionale et internationale de la crise syrienne ne sont pas la situation la plus trouble, et chacun sait ce dont nous parlons.
Je suis à votre disposition.
Question : Dans la déclaration il est dit « Les attaques ont comporté des tirs de l’artillerie et des chars du gouvernement syrien sur des quartiers résidentiels ». Êtes-vous en désaccord avec cela ?
Bashar Al-Ja’afari : Je suis en désaccord avec l’interprétation qui vous a été fournie de cette phrase par l’ambassadeur allemand, l’ambassadeur britannique, et d’autres. L’interprétation était erronée. Il appartient au Général Mood de présenter les faits. Et pas à l’ambassadeur allemand, ou l’ambassadeur britannique, ou d’autres ambassadeurs.
Question : Mais le fait qu’il y a eu des bombardements gouvernementaux sur un quartier résidentiel, était-ce un fait ?
Bashar Al-Ja’afari : Le Général Mood n’a pas dit cela.
Question : Vu que les circonstances n’étaient pas claires, le Général Mood est-il plus factuel que le Secrétaire Général ?
Bashar Al-Ja’afari : C’est exactement ce que je voulais dire à votre collègue. Le Général Mood a dit cela, que les circonstances n’étaient pas claires en ce qui concerne qui était à blâmer pour ces attaques. Oui, il a dit cela, mais dans ce contexte, pas dans le contexte qui vous a été fourni par certains ambassadeurs.
Question : Pensez-vous que cette lettre du Secrétaire Général est plus proche de la déclaration des ambassadeurs allemand et britannique ou de la déclaration faite par le Général Mood dans les consultations ?
Bashar Al-Ja’afari : Plus encline à sympathiser avec les ambassadeurs allemand et britannique, bien sûr.
Question : Qu’en est-il de l’enquête ?
Bashar Al-Ja’afari : Il y a une coopération étroite entre le gouvernement syrien et l’UNSMIS [United Nations Supervision Mission in Syria] en Syrie. Bien sûr après avoir nommé la Commission nationale syrienne d’enquête, les autorités syriennes vont partager avec le Général Mood le résultat de ces enquêtes, et ensuite, naturellement, le Général Mood va partager cette information avec le Conseil de Sécurité et M. Kofi Annan.
Un point important, messieurs : vous-vous souviendrez peut-être que chaque fois que le Conseil de Sécurité avait prévu une session pour discuter de la crise syrienne, quelque chose devait se produire en Syrie. Ou un attentat-suicide, ou une attaque terroriste, ou une forme de massacre, celle que, malheureusement, nous discutons aujourd’hui. Donc, ce n’est pas une coïncidence fortuite que ce massacre ait eu lieu seulement un jour avant l’arrivée de M. Kofi Annan en Syrie. Cette dimension est très importante parce qu’elle jette des doutes sur les motivations réelles de ceux qui ont perpétré ce crime horrible. Ils cherchent l’escalade, ils cherchent à mobiliser le Conseil de Sécurité contre le gouvernement syrien. Aucun gouvernement que ce soit ne massacrerait ses propres citoyens pour parvenir à une victoire politique sur ses opposants. L’utilisation de l’artillerie et les tirs de chars et de missiles n’auraient pas tué ces civils innocents de la façon dont ils ont été tués. Et cela a été notifié par la déclaration de presse du Conseil de Sécurité qui dit qu’ils ont été tués à bout portant. Cela signifie que c’est un pur assassinat, il ne s’agit pas du recours à l’artillerie et aux tirs de chars.
Question : Vous dites que ce n’est pas le gouvernement syrien, mais qui l’a fait ?
Bashar Al-Ja’afari : Les groupes terroristes armés ont lancé ce type d’attaques terroristes depuis le début de la crise en Syrie. Ce n’est pas ici le premier incident qui a eu lieu en Syrie. Bien sûr, ce qui s’est passé hier est un crime horrible, épouvantable, injustifié et injustifiable. Mais aucun gouvernement sur terre ne commet ce type de meurtre. Il s’agit de groupes armés, il s’agit d’un crime terroriste. Nous ne pouvons pas le décrire avec d’autres termes. Ceux qui ont commis ce crime seront tenus responsables devant la justice syrienne, et la Commission nationale d’enquête nommée hier par le gouvernement devra présenter son rapport dans les trois jours à compter d’aujourd’hui. Donc, assurément, nous allons savoir qui est derrière ce crime horrible ; c’est une affaire de trois jours.
Question : Ne serait-ce pas un prétexte pour blâmer le gouvernement qu’ils donnent par procuration aux membres du Conseil de Sécurité ?
Bashar Al-Ja’afari : Comme je l’ai dit au début, nous devrions regarder le tableau dans son intégralité. La question n’est pas d’aller dans les détails. Parfois les détails sont importants mais parfois ils ne le sont pas. La question est d’avoir le bon jugement sur ce qui s’est passé. Et pour avoir le bon jugement vous devez considérer le tableau dans son intégralité dans son contexte historique, avec ses dimensions géopolitiques. Comme je l’ai dit, il y a une dimension arabe, il y a une dimension régionale et une dimension internationale de la crise syrienne. Et certains pays disent publiquement qu’ils vont appuyer – et ils ont déjà appuyé – la branche militaire syrienne de l’opposition avec des armes. Les gens devraient être très prudents en lisant la carte de ce qui se passe en Syrie.
Question : Serait-ce pour pousser à augmenter la taille de l’UNSMIS, peut-être pour armer son personnel, pour une sorte d’internationalisation ?
Bashar Al-Ja’afari : C’est peut-être un des objectifs visés par ceux qui ont commis ce crime. Cela pourrait être une des raisons. Une raison très importante pour perpétrer ce genre de crime horrible : accentuer l’internationalisation de la crise syrienne, et augmenter le personnel de l’UNSMIS.
Merci.