Publié le : 11 août 2012
Source : marianne2.fr
Ancien chef du service de renseignement et de sécurité des services français, Alain Chouet rappelle que «la féroce dictature» d’Assad est soutenue encore par presque un tiers de la population syrienne. Faudra-t-il se résoudre longtemps à choisir, demande cet expert reconnu, «entre des dictatures militaires et des théocraties imbéciles»? Triste choix….
A force d’incantations, les augures finiront sans doute par avoir raison. Le régime syrien à la tête d’un pays de taille moyenne et aux ressources limitées ne saurait résister indéfiniment à la pression conjuguée des armées occidentales qui assistent sa rébellion, aux théocraties islamistes qui la soutiennent financièrement, aux partis islamistes turc, irakiens, libanais et jordanien qui assurent sa logistique et son appui aux frontières. Face à une telle coalition, Bashar el-Assad peut encore gagner la guerre. Mais la Syrie ne se relèvera probablement pas de l’épreuve et s’enfoncera durablement soit dans la guerre civile soit dans la constitution de réduits communautaires hargneusement repliés sur eux-mêmes.
Une barbarie en chasse une autre !
Mais plutôt que se réfugier dans les incantations, nos augures auraient peut-être intérêt à s’interroger sur l’extraordinaire capacité de survie du régime syrien qui est incontestablement une dictature féroce mais qui n’aurait tout de même pas dû résister aussi longtemps à la tête d’une armée qui lui demeure largement fidèle s’il n’était que l’expression du pouvoir d’un autocrate sanglant et de sa famille et s’ils ne comptait pas de partisans dans le pays. Et ces partisans, inaudibles de nos élites, ne sont autres que les minorités non-musulmanes ou non-arabes du pays dont elles représentent près de 30% de la population : chrétiens de toutes obédiences, alaouites, chiites, ismaéliens, druzes, une bonne partie des kurdes.
Tous sont promis à l’asservissement, voire au génocide, si la rébellion menée par les islamistes et leur fer de lance djihadiste s’empare du pouvoir comme en Libye, en Egypte, en Tunisie ou au Yémen avec l’étrange bénédiction des Occidentaux. C’est l’obstination des Occidentaux, France en tête, à soutenir et promouvoir partout l’islamisme politique au profit des pétromonarques wahhabites qui condamne les peuples arabes à devoir choisir partout entre dictatures militaires et théocraties imbéciles. L’avenir dira si les investissements massifs du Qatar et de l’Arabie dans nos économies en crise valaient cette complaisance à l’égard de la nouvelle barbarie qui remplace l’ancienne que nous avions encouragée et soutenues pendant tant d’années.