Politique France

« Les cons, ça ose tout, c’est même à cela qu’on les reconnaît » – Michel Audiard, Les Tontons Flingueurs

On ne dira jamais assez combien cette savoureuse sentence du génial Michel Audiard est en passe de devenir la phrase qui peut, presque à elle seule, résumer notre époque.

Ainsi, la première adjointe au maire de Paris, Anne Hidalgo, a déclaré ce lundi sur le plateau d’iTélé face à Christophe Barbier, évoquant Marine Le Pen et à propos du Front National, je cite (accrochez-vous, c’est du lourd !) :

« Le Front national n’est pas un parti qui s’est constitué dans le cadre républicain, c’est un parti qui a lutté contre la République, qui a soutenu pendant la guerre la collaboration avec les nazis ».

Elle avait fait précéder cette saillie mémorable d’un  « l’histoire a du sens » on ne peut plus savoureux en l’occurrence.

Il est à noter que le cher Christophe Barbier n’a évidemment pas pipé mot devant les énormités proférées par la protégée de Bertrand Delanoé. Mais qui pourrait bien s’en étonner ?

Le Front National a bien évidemment aussitôt porté plainte pour diffamation.

On aimerait savoir, madame Hidalgo, comment un parti fondé en 1972 pourrait bien avoir « soutenu pendant la guerre la collaboration avec les nazis », comment ce même parti pourrait ne pas être « un parti qui s’est constitué dans le cadre républicain » (dans quel cadre s’est-il constitué alors ?), ou enfin quand, où et comment il a jamais « lutté contre la République » ?

Questionnée sur cette sortie rocambolesque, et au lieu de calmer le jeu en reconnaissant après coup l’inanité de ses affirmations, madame Hidalgo s’est sentie obligée depuis d’en rajouter une couche. Je cite à nouveau :

« Je crois qu’en consultant les ouvrages consacrés au FN, on trouve les éléments qui justifient mon propos de manière scientifique »…

Et encore : « J’ai dit cela parce que je pense que l’on perd le sens de l’histoire ».

Ah, ça, madame, pour ce qui de la perte du sens de l’histoire, votre démonstration est en effet absolument lumineuse !

Car pour réussir à trouver des éléments qui justifient de manière « scientifique » qu’un parti qui n’existera que trente ans plus tard a soutenu la collaboration avec les Nazis, il va falloir vous lever de bonne heure!… Un parti fondé -et soit dit en passant- par un homme qui, quoiqu’on puisse penser de lui par ailleurs, n’avait que 11 ans au début de la seconde guerre mondiale, dont le père fut tué par une mine allemande en 42 et déclaré à ce titre pupille de la Nation, qui tenta à tout juste 16 ans d’entrer dans la résistance comme cela a été depuis rapporté par un témoin incontestable (et communiste !), Raymond Casas, fondateur du musée de la Résistance et de la Déportation de Blois.. Comme CV de collabo, avouez qu’on peut faire un peu mieux, non ?

On pourrait, par exemple, je ne sais pas, moi… Avoir eu et dès avant-guerre des amitiés cagoulardes avérées… Avoir participé à des manifestations de l’Action Française… S’être installé pendant l’occupation à Vichy, y avoir travaillé à la Légion Française des Combattants (en1942), puis la même année, au Commissariat Général aux Prisonniers de Guerre et Rapatriés… Avoir été ensuite décoré de la Francisque (N° 2202) par le Maréchal Pétain lui-même, après lui avoir prêté le serment suivant, assez peu équivoque, vous en conviendrez : « Je fais don de ma personne au Maréchal Pétain comme il a fait don de la sienne à la France. Je m’engage à servir ses disciplines et à rester fidèle à sa personne et à son œuvre. »… Avoir peut-être aussi écrit à sa sœur en mars 1942 : « « j’ai vu le maréchal au théâtre [...] il est magnifique d’allure, son visage est celui d’une statue de marbre. »… Avoir encore et dans une autre lettre d’avril 1942 déclaré n’être pas particulièrement inquiet du retour aux affaires de Pierre Laval -qui devait juste faire ses preuves- et condamné la fonctionnarisation de la Légion Française des Combattants (LFC) pour lui préférer le Service d’Ordre Légionnaire (SOL) que venait de mettre en place le charmant Joseph Darnand… Avoir au final attendu les premières grandes défaites militaires de l’Allemagne pour enfin devenir un adversaire du collaborationnisme, puis un résistant de la –presque- dernière heure… Avoir ensuite, longtemps après la guerre et donc en toute connaissance de cause, ayant accédé aux plus hautes fonctions de la République, fait fleurir pendant des années la tombe du Maréchal Pétain… Avoir enfin  -et jusqu’au bout- entretenu une forte amitié avec l’ancien secrétaire général de la police du régime de Vichy, René Bousquet… (source Wikipedia)…

Mais il est vrai qu’alors, on ne s’appellerait plus Jean-Marie Le Pen…. Mais François Mitterrand !

« Je me battrai toute ma vie contre les idées extrêmes maniées par le Front national » a au final encore ajouté madame Hidalgo…

Et bien permettez-moi, madame, et en ce qui me concerne, de lutter -toute ma vie aussi je l’espère- contre les cuistres qui, avec un aplomb hors norme et une malhonnêteté vraiment « extrême » elle, choisissent non pas de combattre -très légitimement- des idées politiques qu’ils réprouvent comme il est juste et sain de le faire en démocratie, mais optent délibérément pour le mensonge, la caricature, l’excommunication, l’injure et -comme vous- pour le viol éhonté de l’histoire. Les mêmes cuistres qui s’autorisent à éjecter d’autorité hors de la sphère démocratique leurs adversaires quels qu’ils soient, en leur attribuant pour l’occasion des affinités et affections coupables que leurs « héros » ont -eux- parfois réellement éprouvées .

ML – La Plume à Gratter

Mots clés : Anne Hidalgo, Christophe Barbier, collaboration, François Mitterrand, Front National, Jean-Marie Le Pen, occupation