Publié le : 03 juillet 2013
Source : lefigaro.fr
Dans un tract, le syndicat de policiers Alliance déplore l’utilisation systématique de forces de maintien de l’ordre contre des militants pacifiques.
La comédie a assez duré pour les CRS qui, par l’intermédiaire du syndicat Alliance, a publié mardi un tract dénonçant leur mobilisation disproportionnée pour contenir d’éventuels désordres causés par le mouvement « Veilleurs debout! ». En continuant leur « action » bien après le débat sur le mariage homosexuel, ces militants pacifiques de la Manif pour Tous font encore l’objet d’une surveillance étroite des forces de police. « Malgré la diminution significative des effectifs », se plaint le syndicat Alliance police nationale, les hommes des compagnies républicaines de sécurité (CRS) sont appelés en nombre un peu partout en France pour canaliser une poignée d’individus.
« Une compagnie mobilisée pour six présumés «veilleurs debout! » qui auraient pu troubler la quiétude de la République…», ironise le tract policier en faisant référence à un déploiement de la CRS 10 du Mans à Paris. La compagnie avait été appelée le 28 juin à surveiller les «veilleurs» autour du Palais de l’Élysée. « Un déplacement très “productif” dans la capitale », grimacent les policiers. « Consignes approximatives, ordres, contre-ordres et panique des autorités ont “nourri” les 6 heures de vacation de la CRS 10 », critiquent encore les CRS qui n’hésitent pas à juger leur mission « ridicule ».
« Les autorités ne savent plus quoi inventer »
«L’histoire aurait pu s’arrêter là mais, à la fin de la vacation, alors que la compagnie est libérée, deux méchants veilleurs debout sont repérés in extremis à quelques pas de l’Élysée, poursuit, caustique, le tract d’Alliance. La CRS 10 a ordre de faire demi-tour de toute urgence avec pour consigne: faire peur aux deux méchants trublions… jamais retrouvés d’ailleurs! ». Le convoi de CRS « n’a fait qu’un aller-retour » sur ledit secteur « tous gyrophares allumés », avant de repartir pour Le Mans. « Grâce aux CRS, la République a été épargnée, ironise encore les policiers. Visiblement les autorités parisiennes ne savent plus quoi inventer pour obtenir toujours plus de CRS dans la capitale, et ce quel qu’en soit le prix. »
Sur la page Facebook du syndicat, le tract collectionne les «like», passant de 45 à 250 en quelques heures. Avec cette activité sur les réseaux sociaux et la jubilation du collectif de la Manif pour Tous, le secrétaire général du syndicat Alliance, Jean-Claude Delage, précise qu’« il n’y a aucun message politique derrière ce tract ». Le sens de celui-ci est de dire qu’« on ne doit pas employer des forces de sécurité comme les CRS à des tâches inutiles, explique-t-il. S’il est normal d’être déployé sur des manifestations pour des raisons évidentes d’ordre public, là ce n’est pas du tout le cas. Il ne s’agit ni de terroristes, ni de trafiquants de drogue ; ni de casseurs. Il est malheureux pour la sécurité du pays de mobiliser des forces là où ne sont pas les besoins. »
Des précédents existent dans la critique de leur «utilisation». En novembre 2012, c’est l’unité SGP Police (Force ouvrière) qui affichait dans un tract son ras-le-bol, cette fois sur la gestion des troupes à Notre-Dame-des-Landes. Les policiers dénonçaient « une gestion ultracentralisée » qui « ne cessait de poser des difficultés aux compagnies engagées », notamment avec « un défaut cruel d’anticipation des événements et l’absence d’information fiable ». « Cette gestion au coup par coup va-t-elle durer jusqu’au décollage du premier avion prévu en 2017? », interrogeaient alors les policiers.
Le tract sur les «veilleurs» apporte de l’eau au moulin de la Manif pour Tous qui dénonce depuis toujours « le déploiement excessif des forces de l’ordre », donnant le sentiment que « Manuel Valls instaure sa police politique ». « Que des gens chargés de la sécurité du pays se plaignent de ne plus se retrouver dans les missions qui leur sont confiées et les ordres qui leur sont donnés, cela dénonce bien une dérive autoritariste du gouvernement » analyse Franck Meyer, du Collectif des maires pour l’enfance. Il ne craint pas le danger puisqu’il n’y en a pas avec les “veilleurs” – la police le dit elle-même – mais la contestation, qu’il ne peut tolérer.
Delphine de Mallevoüe