Publié le : 12 janvier 2014
Source : bvoltaire.fr
La gauche peut tout se permettre puisqu’elle estime détenir le magistère moral. Cette Inquisition moderne décide qui pense ou ne pense pas.
Madame Taubira, dans un entretien récent à Paris Match (1er janvier dernier), refuse l’éventualité d’un débat avec madame Le Pen en arguant notamment qu’elle veut « débattre avec des gens qui pensent ». On en déduit sans difficulté que madame Taubira estime que madame Le Pen ne pense pas. Cette affirmation définitive émanant du ministre de la Justice mérite d’être étudiée de près.
D’abord, il faut revenir à la définition des mots, surtout à une époque où la peine de mort – si elle n’existe plus pour les hommes – est largement appliquée par les juges de la pensée unique à ces petites choses qui sortent de notre bouche et du bout de nos doigts tapoteurs. Penser, cela veut dire former des idées dans son esprit, concevoir des notions, des opinions, par l’intelligence, la réflexion. Tout le monde n’a pas évidemment la haute et puissante intelligence de madame Taubira, mais il me semble que tout être humain est par définition un être pensant, aussi modestes soient ses dispositions et sa formation intellectuelles. En tout cas, c’est ce que j’ai appris durant mes humanités. À tout le moins, madame Le Pen a fait quelques études, est avocat de formation, dirige un grand parti, est mère de famille, bref exerce des activités qui nécessitent de cogiter un minimum ! Eh bien, non. Pour madame Taubira, madame Le Pen est quelqu’un qui ne pense pas. Dont acte.
Or, la pensée est l’apanage de l’espèce humaine. C’est ce qui fait sa grandeur. « L’homme sans pensée : ce serait une pierre ou une brute », écrivait Pascal. Madame Le Pen n’est visiblement pas un minéral, même si elle est la digne fille du Menhir. Donc, elle serait une brute, c’est-à-dire un être resté à l’état de nature, à l’état sauvage, un animal en somme ! Elle rejoint donc, dans son malheur, madame Taubira qui affirma le 13 novembre 2013 à France 2 — on en pleure encore dans toute la Bobotie — que les propos racistes qui avaient été proférés à son encontre lui déniaient son appartenance à l’espèce humaine. Il me semble que madame Le Pen pourrait à juste titre prendre rendez-vous chez M. Pujadas pour y tenir les mêmes propos, mot pour mot.
On me dira que ce n’est pas la même chose. C’est vrai. D’un côté l’attaque raciste à l’encontre de la ministre était grossière, sans fioritures et n’émanait pas de la fine fleur intellectuelle qui déploie suavement ses arômes dans Paris. De l’autre, il s’agit du jugement définitif émanant d’un haut responsable politique qui connaît le poids des mots d’autant qu’ils sont appelés à être transcrits.
Mais l’on en revient toujours à la même chose. La gauche peut tout se permettre, tout dire puisqu’elle estime détenir le magistère moral. Désormais, cette Inquisition moderne décide qui pense ou ne pense pas. Encore un petit effort et l’on se demandera carrément si les responsables du Front national ont une âme. Monseigneur d’Angoulême pourra, du reste, apporter utilement sa contribution épiscopale, philosophique et académique à cette nouvelle controverse.
Georges Michel