Publié le : 23 mars 2014
Source : bvoltaire.fr
A l’issue des élections municipales dont se déroulera dimanche le premier tour, il n’y aura aucun élu d’extrême-droite. La gauche nous jouera pourtant le grand numéro du « front républicain », qui n’aura pas fonctionné, à cause de la droite classique bien sûr. Pourquoi ? Il y aura pourtant, certainement, des élus FN et RBM, voire des élus majoritaires dans certaines communes, donc des maires FN-RBM. Mais alors ?
Il n’y aura pourtant pas d’élus d’extrême-droite. Parce que le Front national ne relève pas ou plus de l’extrême-droite. Des années 1970 aux années 2000, Jean-Marie Le Pen avait incontestablement fédéré les droites dures, et parfois radicales, et parfois extrêmement conservatrices. Lui-même, le lutteur devenu aujourd’hui un vieux lion, était certainement fort éloigné de toute « tentation fasciste » ou « néo-fasciste », qui était en partie présente (en partie seulement !) dans Ordre Nouveau, mouvement avec lequel il avait très vite rompu, en 1973, après un an seulement de compagnonnage. Libertaire de droite, attaché à sa liberté de parole, non conformiste en matière de doxa historique, JMLP était – et est – pour autant, à bien des égards, un homme de centre-droit, un Maurice Faure de droite, pour évoquer un homme politique à l’ancienne, récemment décédé, cultivé, bien différent de la classe politique actuelle, inculte, arrogante et fascinée par l’argent.
C’est l’impossibilité d’être tranquillement « de droite » qui a poussé JMLP « à la droite de la droite » – celle-ci qui, jusqu’en 2007, d’ailleurs, ne cessait de refuser d’être qualifié de « droite ». Accepter ce qualificatif fut toute la « révolution Sarkozy ». Avec Marine Le Pen, les choses ont évolué. Le FN se voulait la « droite nationale » (droite nationale, sociale, et populaire, disait son slogan). Ce n’est plus le cas. Pour la première fois depuis la dernière guerre mondiale, un dépassement des catégories de droite et de gauche est en cours – ce qui explique que le FN prenne des électeurs à la droite comme à la gauche, et ce dépassement n’a rien à voir avec une résurgence d’un quelconque « fascisme ». C’est que droite et gauche ne veulent plus rien dire, ce sont des catégories-résidus.
Le vote FN ne relève pas du racisme, les Français n’ont pas de « conscience raciale », au grand dam des identitaires d’ailleurs, ils demandent que le français résonne encore majoritairement dans l’espace public, ce qui n’est plus le cas dans les transports en commun de la région parisienne par exemple (« On habite une langue avant d’habiter une patrie » disait Cioran), ils demandent que leur culture, leur vision de la société, de la laïcité, de la place des hommes et des femmes, soient respectées.
Sans se glorifier d’être français, ils n’envisagent pas que ce soit une honte. Ils ont raison. Le vote Front national traduit notamment cela. Il ne traduit ni la montée du « racisme », ni la montée d’une « extrême-droite » qui, en tant que telle, ennuie au dernier degré la plupart des électeurs du FN.
Que le Front national ne soit pas d’extrême-droite ne veut évidemment pas dire que l’on ne puisse pas lui objecter telle ou telle critique, ou s’opposer à telle ou telle de ses positions. Mais partons du réel, et parlons du réel : le FN est un parti « populiste », pas autre chose. Il n’a pas pour autant le monopole du peuple, c’est entendu. Ça sera déjà un bon point de départ dans les discussions.