Publié le : 25 mars 2014
Source : bvoltaire.fr
Il a à peine 35 ans. Il vient de l’extrême gauche, Lutte ouvrière, puis le Nouveau parti anticapitaliste (NPA). Plombier, il était secrétaire du syndicat CGT des agents territoriaux de la mairie de Nilvange. Pour une fois, l’extrême gauche tenait un véritable ouvrier, pas un de ces fils de bourgeois qui ne sont que les enfants de leur lecture, et ne connaissent rien à la dure réalité du salariat. Il se présentait à chaque élection locale, et faisait de bons scores.
Et puis tout s’est enrayé. Fabien a commencé à se poser des questions. La candidature d’une militante voilée, Ilham Moussaïd, soutenue par son parti aux élections régionales PACA, l’a plus que perturbé. Et il s’est mis à réfléchir, dans une région où les hauts-fourneaux ferment les uns après les autres, malgré les promesses de Sarkozy ou de Hollande, et les gesticulations de syndicalistes à la Édouard Martin, à la solde du PS.
Et quand on tire un fil, souvent, toute la pelote vient. Fabien s’est interrogé sur l’Union européenne, sur l’immigration, sur l’insécurité, sur l’islamisation de son pays. Et finalement, presque de manière honteuse, il a été un jour écouter Marine Le Pen. Il a été séduit par des réponses qu’il n’entendait nulle part ailleurs. Il a donc choisi, après une longue réflexion, et de douloureuses remises en cause, de s’engager à ses côtés.
Du côté de la CGT, cela n’a pas traîné. Les bureaucrates cravatés ont décidé de l’exclure. Ils ont sommé la section syndicale d’élire un autre responsable. Hélas, frondeuse, la base a envoyé balader les petits chefs locaux et a maintenu sa confiance à 90 % à l’hérétique. Force devant rester à la loi, la section syndicale a donc été dissoute, comme aux plus belles années des purges staliniennes. Convoqué à Montreuil, Fabien a même eu droit à un comité d’accueil de 500 excités, qui lui ont craché dessus au milieu des insultes et de quelques coups de pied sournois.
Les bureaucrates syndicaux et des politiciens comme Mélenchon préfèrent ignorer que 44 % des ouvriers votent FN, à ce jour, tout simplement parce qu’ils sont les premières victimes de la mondialisation libérale, de l’abandon de notre souveraineté, de nos frontières, et d’une politique migratoire qu’ils ne comprennent pas, mais subissent, en période de chômage de masse.
De retour sur ses terres, Fabien eut droit à tout le registre que le camp du bien réserve aux méchants : injures, menaces de mort, intimidations physiques, contre-manifestations squelettiques de gauchistes dégénérés… Il en fallait bien plus pour intimider un militant par ailleurs défenseur de la cause animale – son premier engagement politique. Comme l’homme est intelligent, et fin politique, il fut rapidement remarqué par Marine Le Pen en personne, et se retrouva membre du bureau national du FN en même temps que conseiller auprès de la présidente sur la question sociale.
Ce dimanche, candidat aux municipales d’un lieu ô combien ! symbolique (Hayange), il est arrivé en tête, crédité de plus de 30 % des voix. Il devra faire face à une triangulaire difficile, mais conserve toutes ses chances pour devenir maire de cette commune.
Hier, les ouvriers avaient un parti (le PCF) qui permettait à des personnes au profil de Fabien de faire de la politique, et parfois de s’élever socialement grâce à leurs qualités. Aujourd’hui, plus aucun ouvrier n’est élu à l’Assemblée nationale, et la gauche est infestée d’énarques, de carriéristes, de bobos écolos prétentieux qui ont le plus grand mépris pour le monde du travail.
Beaucoup moins stupide que ne le pensent les faiseurs d’opinion, insensible aux amalgames à deux balles, pragmatique, le monde ouvrier, trahi de toutes parts, se tourne de plus en plus vers les seuls qu’il n’a pas essayés, et qui parlent encore de lui.
Après Hénin-Beaumont et Steeve Briois, Hayange et Fabien Engelmann en sont la meilleure illustration.
Pierre Cassen