Publié le : 11 avril 2014
Source : lepoint.fr
Impressionnante performance médiatique jeudi soir de Marine Le Pen chez David Pujadas dans Des paroles et des actes. Tout le monde a été « bluffé » par le talent exceptionnel de la leader du Front national à tenir tête et débattre pendant deux heures, face à une multitude d’attaques, de critiques et de tentatives de déstabilisation. Marine Le Pen devient l’équivalent dans le domaine politique d’un sportif de haut niveau au sommet de son entraînement et de la maturité de son art.
La performance sportive est alliée à un autre don, que l’on trouve aussi chez les grands comédiens, de parler toujours « juste ». On trouve cela par exemple chez certains génies du stand up comme Muriel Robin. Hé bien Marine Le Pen a ce don, avec celui de l’improvisation. Dans chaque séquence de l’émission, elle s’adapte à son interlocuteur, détecte en quelques secondes ses points faibles, et tire entre les deux yeux. On ne voit pas très bien, aujourd’hui, qui peut tenir sur le ring d’un plateau de télé, qu’il soit journaliste, politique ou membre de la société civile. Au pire, elle gagne aux points, mais la plupart du temps, c’est par KO.
Débat démocratique ou vocifération populiste
Jeudi soir, il s’agissait pour France 2 de lancer la campagne pour les élections européennes. Pour la candidate euro-sceptique, euro-critique, euro-allergique, certes, c’était un boulevard. Il n’empêche que, même sur un sujet pareil, dont chacun sait à quel point l’opinion y est hostile, et la perspective certaine d’une émission des plus ennuyeuses, elle réussit encore à en faire un événement et à nous tenir en haleine jusqu’au bout. Bien sûr, le sujet se prête aux grandes figures imposées, comme en patinage artistique, triple luts avants sur l’immigration, double axel arrière sur le chômage et vrille sur l’abandon de la souveraineté nationale.
Mais quand même, chapeau, l’artiste ! Chaque parole, chaque phrase, chaque slogan, chaque bon mot, même la gestuelle, les expressions du visage donnent au téléspectateur l’impression que c’est lui-même qu’il entend, qu’elle ose dire ce qu’il pense au moment où ça lui vient à l’esprit. On a l’impression d’assister à un best of de « micro-trottoirs », à une parole qui condense l’opinion publique, mais une opinion qui sortirait du caniveau et à qui on rendrait ses lettres de noblesse en la replaçant dans le cadre du débat démocratique et non de la vocifération populiste. La performance de Marine Le Pen, c’est d’incarner le peuple, et de lui procurer une certaine jouissance de se voir et de s’entendre dans l’expression de sa colère, de ses désillusions à l’égard de ses représentants, de sa révolte devant l’injustice et la violence du monde.
Le peuple
Donc, lorsqu’on arrive à la fin de l’émission, tout le monde y croit. Tout le monde pense que si ça continue comme ça, non seulement elle sera devant le PS aux européennes, mais que, si ça se trouve, elle arrivera à convaincre les Français de la mettre au second tour de la présidentielle de 2017, et, patatras, qu’elle pourrait bien gagner, et alors là… Hé bien oui, d’ailleurs, et alors là ? Marine Le Pen a tellement ébloui dans sa critique généralisée des partis de gouvernement, elle a tellement convaincu qu’il fallait voter pour elle et se débarrasser de tous les autres incapables, qu’on a complètement oublié de lui poser la question. Marine Le Pen, vous incarnez tellement bien le peuple, la colère et la souffrance du peuple, qu’il va vous élire et vous porter au pouvoir. Et à ce moment-là, qu’allez-vous faire ? Répondez Marine, les-Français-veulent-savoir.
Hé bien hier soir, dans Des paroles et des actes, elle a répondu, très clairement. Quand elle sera au pouvoir, elle rendra le pouvoir au peuple, elle lui rendra ce pouvoir que les autres incapables lui ont confisqué. Et là, tout à coup, on est perplexe, on se pose la question, mais est-ce que le peuple veut vraiment qu’on lui rende le pouvoir ? Qu’on se décharge sur lui de la responsabilité de toutes les calamités qu’il subit. Est-ce que c’est au peuple d’endosser la culpabilité de créer du chômage et de la récession, de faire que la France est en train de se casser la figure ? Est-ce que le peuple ne préférerait pas, même si ce n’est pas de la vraie démocratie directe, qu’on lui fiche la paix avec des référendum incessants pour savoir s’il est pour l’immigration, les frontières, la peine de mort, financer des mosquées ? Est-ce que le peuple n’a pas juste envie de désigner démocratiquement des personnes compétentes qui peuvent le sortir de la mouise ?
Nathalie Reims
Ah oui quel dernier paragraphe, je m’attendais à une révélation du genre mise en maison de retraite pour tout ce qui coûte plus qu’il ne rapporte, en sorte de retour de bâton, et là patatra, c’est quoi cette digression sur la stupidité du populo qui finalement se contente tranquille de sa baguette et ses écrans plats. C’est ce paragraphe, je le souhaite qui lui coûtera le plus cher.
In cauda venenum !
@ Jacques Etienne
Certes, mon cher Jacques, certes ! Il ne fallait évidemment pas espérer autre chose dans un article du Point ! On dirait du Apathie dans une entrevue sur RTL, avec la crapulerie journalistique balancée systématiquement à la dernière minute pour tenter de finir en « beauté ». Et quel mépris du peuple, abruti et qui ne demande au fond qu’à être mené tel un troupeau de moutons de Panurge par des gens « qui savent »… Tout l’esprit de l’oligarchie qui nous étouffe est là !
Mais tout de même… Une journaliste bien-pensante s’il en est, qui écrit dans le même torchon que … BHL, qui ose dire que Marine Le Pen est une bête politique qui n’a pas son équivalent en France, qui reconnaît qu’elle écrabouille, qu’elle éparpille « façon puzzle » ses contradicteurs quels qu’ils soient… Ca fait du bien à la lecture, non ? M’est d’ailleurs avis qu’elle va le payer cher !
Amitiés
Marc LEROY – La Plume à Gratter