Publié le : 09 jnavier 2015
Source : cercledesvolontaires.fr
Suite aux récents événements, nous avons souhaité nous entretenir avec le Brigadier Toul*, afin de mieux comprendre le déroulement des faits, les protagonistes, et l’action des services secrets français ainsi que celle de notre gouvernement. Nous précisons encore une fois que nous ne partageons pas forcément l’ensemble des positions et des analyses des personnes que nous interrogeons, des points de vue que nous relayons.
Cercle des Volontaires : Vous me disiez que les personnes qui ont commis l’attaque de Charlie Hebdo et la personne qui a commis la prise d’otage à Porte de Vincennes appartiennent au même groupe ?
Brigadier Toul : C’est le même groupe. Les gars ont décidé de faire leur djihad et ils vont aller au carton jusqu’au bout. Donc c’est exactement le même groupe et sur ce groupe il en manque sept qui sont toujours sur Paris, et armés et dangereux.
CdV : Donc les deux qui ont fait l’attentat à Charlie Hebdo sont assiégés, il y en a deux qui sont à Vincennes, qui viennent de faire une prise d’otages, et tu me dis qu’il y en a encore sept autres ?
BT : Ils étaient dix. Le groupe de Vincennes, ils sont dix. Il y en a sept dont on n’a pas de nouvelles.
CdV : Mais alors à Vincennes ils sont combien ?
BT : Il est tout seul, d’après les écoutes qu’on a.
CdV : Ça fait longtemps qu’on sait qu’ils sont sur le point de commettre un attentat ?
BT : Ça fait un petit moment, mais premier problème, c’est qu’en France on a tellement l’habitude de faire la politique de l’Autruche que les alertes ne sont pas prises en compte. On en a parlé déjà plusieurs fois. C’était éminent, ben voilà, ça se confirme.
CdV : Mais les services étaient au courant, donc.
BT : Mais les services savaient que ça allait se produire, mais on n’avait pas de date précise.
CdV : Bien sûr, et quand il y a plein de menaces, c’est compliqué de surveiller tout le monde, mais là, peut-être que ça aurait dû être fait quand même ?
BT : Le problème, c’est que pour assurer le suivi d’une personne, il faut être au minimum vingt personnes pour un individu. Donc en réduisant les équipes et les budgets, tu fais le calcul… Il faut bien que les gens se reposent de temps en temps. Pour un individu, il faut une équipe de vingt, donc tu vois un peu la situation… Comme on a réduit les effectifs, on a réduit les moyens, et ben voilà.
CdV : Le groupe de sept, ils sont, à ton avis, en région parisienne, ou ils peuvent être disséminés partout en France ?
BT : Non non, ils sont dans la région parisienne, ça c’est clair. Ils sont connus des services. Mais bon, ça ce n’est pas le plus grave. Le plus grave, c’est qu’il y a trois cent individus qui sont rentrés du même groupe, qui sont disséminés sur l’ensemble du territoire national.
CdV : Il y en a sept dans cette cellule, mais des gens comme eux, il y en a trois cent en tout qui reviennent de Syrie et d’Irak ?
BT : Voilà, sur l’ensemble du territoire national, et là c’est beaucoup plus grave.
CdV : Ok. Et surtout, ça va leur donner de la suite dans les idées, ce qui s’est passé…
BT : Tout à fait, logique.
CdV : Eux, ça fait combien de temps qu’ils sont rentrés, le groupe des dix ?
BT : Si tu veux, ils étaient tous incarcérés, on les avait mis en taule. Avec ce genre d’individus, il ne faut pas se poser la question. Si tu les « attrapes », tu sais que forcément, ce sont des gens qui vont aller au carton. Donc, à mon avis, il faut répondre à leur manière. Il ne faut pas tergiverser avec eux. Avec ces gens-là, tu ne peux négocier, tu ne peux pas discuter, parce qu’à un moment ou à un autre, ils vont commettre un attentat.
CdV : Mais la solution ne serait-elle pas de les envoyer en prison pour plusieurs dizaines d’années, et/ou les munir d’un bracelet électronique ?
BT : Non, d’après moi, il faut une solution radicale.
CdV : Vous parlez de la peine de mort ?
BT : Il n’y a pas à discuter avec ces gens-là. Il est inutile de parler de peine du mort, inutile de les placer en jugement. C’est une guerre. Point barre.
CdV : Exécution extrajudiciaire ?
BT : Voilà, c’est clair, net et tout simple. C’est une guerre.
CdV : Donc tu es finalement du même point de vue qu’Aymeric Chauprade, qui disait qu’il ne fallait pas les laisser rentrer en France, qu’il fallait les éliminer in situ ?
BT : Mais bien sûr, et la morale n’a rien à voir là-dedans. C’est une guerre avec des gens qui sont déterminés à te foutre sur la gueule et à tuer tout le monde, tu ne peux pas te permettre de les laisser passer, parce que ce sont des innocents qui paient, et ce sont nos libertés qui sont en jeu. Donc le boulot doit être fait, peu importe la méthode. Il n’y a pas de morale qui tienne, ni judéo-chrétienne, ni rien, ça n’a rien à voir, ni une morale politique. Il faut que ça soit fait. C’est tout. Point barre. Si on ne veut pas des veuves et des orphelins, il faut absolument appliquer cette politique, zéro tolérance. Il ne faut même pas chercher à discuter, et il faut y aller.
CdV : Le gouvernement français est quand même un peu coupable dans le sens où toutes les armes…
BT : Il est coupable dans le sens où il a laissé faire, où il a coupé les budgets de l’armée française, il est coupable parce qu’il a fourni des armes et de la logistique et des moyens à ces groupes là, donc il est totalement coupable et responsable.
CdV : De plus, le gouvernement français a donné un mobile supplémentaire en disant : « Bachar ne mérite pas de vivre », etc. Donc les jeunes des banlieues avaient d’un côté des imams radicaux qui essayaient de les manipuler en disant « il faut tuer Bachar Al Assad », et de l’autre côté le gouvernement français qui leur disait « Bachar el Assad ne mérite pas de vivre », ils avaient les deux en stéréo…
BT : Quand on sait que c’est grâce aux informations que nous ont fournies les services de renseignement de Bachar Al-Assad que la plupart de ces djihadistes ont été « levés » [repérés, ndj] dès le départ, ça la fout mal quand même, on est cons à un moment donné. En clair, nous avons pu les identifier grâce au gouvernement syrien et à ses services. Soit on continue cette politique suicidaire, soit on se met à prendre vraiment le taureau par les cornes. Sinon, on ne va pas avoir d’autre solution que de faire intervenir l’armée, in fine. Et là, on ne va pas rigoler, parce que c’est pas possible un truc pareil. Je te jure que c’est pas possible. Parce qu’on en a marre de voir des femmes et des hommes de valeur se faire décimer parce qu’on a un gouvernement lâche. Et ça c’est clair. Depuis le temps qu’on le dit, voilà. Alors il faut prendre le taureau par les cornes, et on y va franchement. Il n’y pas d’autre solution. Il faut arrêter de jouer. On n’est plus à se poser des questions. Il faut y aller. Il ne faut pas faire d’amalgame à propos des musulmans : l’immense majorité des français musulmans sont sans histoire, mais il y en a quelques uns qui sont entrés en guerre. Ceux-là, on les connaît, on sait qui ils sont, il faut y aller. Il faut les débusquer et les stopper. Il ne faut pas tergiverser.
CdV : Personnellement, je ne suis pas militaire, je suis un civil, et en tant que citoyen, je me dis qu’on ne peut pas demander ça au GIGN : abattre trois cent personnes en France. Je pense qu’il faut les arrêter et les mettre en prison.
BT : Ça, c’est de la morale « bisounours »… La priorité, c’est d’éviter le maximum de frais pour nous les citoyens, et nos institutions.
CdV : Si je peux me permettre : imaginons que les peines de prison prononcées à l’encontre des djihadistes, s’ils étaient arrêtés, soient des peines de vingt ans de prison incompressibles…
BT : Mais tu sais bien que même s’ils font vingt ans incompressibles, ils sortiront. Ils font des émules à l’intérieur des prisons. Tu te doutes bien.
CdV : Ça dépend comment les prisons sont organisées. Telles qu’elles sont organisées aujourd’hui, oui, c’est sûr, malheureusement.
BT : Le problème il est là. Et comme en France, nous n’avons pas pris les bonnes décisions, à un moment donné, il faut faire face à la réalité.
CdV : Avec ce qui vient de se passer ces derniers jours, les lois sécuritaires pourraient très vite évoluer vers des peines beaucoup plus sévères pour tout ce qui touche de prêt ou de loin au terrorisme…
BT : Non, ça, ce sont des paroles. Il faut des actes. Il faut arrêter le blabla. Avec ces gens-là, tu ne peux pas négocier et tu ne peux pas discuter. C’est une guerre, point barre. Il n’y a pas de discussion possible et pas de négociation possible. A un moment donné il faut se le mettre dans la tête.
CdV : Donc là, le groupe des sept risque de continuer à commettre des attaques, des attentats, des prises d’otage sur Paris et la banlieue ?
BT : Bien sûr. Il faut surveiller ce qui se passe sur les réseaux sociaux. C’est une véritable bombe à retardement. Et comme les djihadistes sont plus armés que nous, ils sont dehors, sur le terrain, il n’y a pas trente-six solutions. Parce que c’est pas avec un 9 millimètres [arme standard des policiers français, ndj] que tu arrêtes des gens comme ça.
CdV : C’est dur. J’avais de la peine quand je lisais les témoignages des deux policiers en vélo qui ont essayé d’arrêter les deux gars qui ont été à Charlie Hebdo.
BT : Ils ont eu un courage exceptionnel, ces hommes. Ils devraient même être reconnus comme héros de la Nation.
CdV : C’est des gens comme eux qui devraient avoir la Légion…
BT : Aller se taper des mecs armés avec des kalachnikovs et des balles qui sont capables de percer des gilets traditionnels de policiers, aller aux gaufres avec leurs neuf millimètres, et bien, chapeau bas. Quand tu vois que des policiers municipaux comme la petite qui s’est fait descendre il y a quelques jours, je suis désolé, elle aussi c’est une victime, mais tu imagines bien que n’importe qui peut tomber sur ces zigotos, que ce soit un journaliste et tout ça ; Et comme les djihadistes n’ont pas peur de se faire tuer, il faut se dire que tous les policiers de France et de Navarre sont susceptibles d’être victimes de ces gens-là. Mais ils ne sont pas équipés pour leur faire face.
CdV : La situation est vraiment tendue.
BT : Bien sûr, mais on le sait depuis longtemps, c’est pas faute d’avoir tirer les sonnettes d’alarme.
CdV : On nous a dit que les assaillants étaient trois à Charlie Hebdo, et là en Seine-et-Marne, ils ne sont que deux retranchés. Où est le troisième ?
BT : Non, ils n’étaient que deux à Charlie Hebdo. Le troisième, c’est un gars qui les a accompagnés mais qui ne faisait pas parti du groupe. Il s’est rendu à la police. Il y en a sept autres qui sont du même acabit qui sont actuellement dans la nature.
CdV : Donc ceux qui ont participé à l’attaque de Charlie Hebdo n’étaient que deux et le troisième c’était un chauffeur de voiture qui ne savait même pas où est-ce qu’il allait en fait.
BT : Oui.
CdV : Brigadier Toul, merci pour votre témoignage.
BT : Merci à vous.
* Le nom a été modifié