Publié le : 17 janvier 2015
Source : bvoltaire.fr
Selon le dernier baromètre TNS-SOFRES, réalisé entre le 8 et le 12 janvier dernier, la cote de confiance de Marine Le Pen stagne (+1 point à 29 %), alors que celles de Nicolas Sarkozy et de François Fillon et des deux têtes de l’exécutif prennent entre 4 et 8 points. Si ces derniers chiffres s’expliquent aisément, dans le contexte particulier d’émotion et de rassemblement lié aux attentats, cette stagnation de Marine Le Pen ne laisse pas de surprendre.
Surtout si l’on se penche sur le détail des chiffres ! À gauche elle gagne 8 points (18%) qu’elle perd à droite (45%) et notamment au sein du Front national où elle ne trouve « que » 86% d’opinions favorables, en baisse de 7 points par rapport au précédent baromètre mensuel… Signe d’un malaise au sein d’un parti longtemps présenté comme monolithique, et dont les désaccords internes affleurent désormais à la surface.
Marine Le Pen s’est-elle trompée de stratégie ces dernières années et, plus précisément, ces derniers jours ? Certains le pensent, au sein même du FN, mais ne le disent pas aussi ouvertement qu’ils le voudraient. Il est certain en tout cas que l’opération « victimisation » à l’occasion de la manifestation du 11 janvier n’a pas eu les effets escomptés, faute sans doute d’un discours audible au sein d’une classe politique unanime dans l’hommage aux victimes.
Sur le long terme, on ne peut que constater le résultat de l’opération de normalisation entreprise depuis son accession à la présidence. Au contraire de son père, Marine veut le pouvoir. Sa politique de dédiabolisation s’est accompagnée d’une épuration dont les victimes dénoncent le caractère brutal, destinée à moderniser l’image d’un parti longtemps voué à agglomérer des personnalités très différentes, et surtout connues pour leurs nostalgies -respectables mais désuètes.
L’ascension fulgurante d’un Florian Philippot en est l’exemple le plus flagrant. Issu de la gauche chevènementiste, républicain au sens mythologique du terme, imperméable au conservatisme moral et social, Philippot est l’emblème d’un FN qui veut impérativement entrer dans le jeu politicien, qui descend dans l’arène et risque, à ce jeu-là, de perdre sa spécificité. Mais a-t-il le choix ? Conserver les mains propres n’a aucun intérêt si l’on veut exercer la responsabilité du pouvoir.
En réalité le nouveau FN avait deux options possibles : élargir son électorat à gauche, en allant chercher les déçus du PS et les anciens du PCF, premières victimes de la mondialisation, mais totalement insensibles aux thèmes traditionnels de maintien de l’identité française et aux questions sociétales. Ou préférer un rassemblement des patriotes autour d’axes politiques forts : souveraineté, identité, libertés. À ce mouvement auraient pu s’agréger nombre de responsables politiques auxquels il aurait été bienvenu de laisser une place. C’était la vocation du SIEL.
Marine Le Pen a manifestement choisi la première voie. Électoralement payante, jusque-là, elle suscite des grincements de dents au sein d’un parti culturellement à droite, et potentiellement capable d’accueillir les nombreux déçus d’une UMP aux allures d’auberge espagnole. Encore faudrait-il que les têtes du parti le veuillent, et que la jeune et prometteuse Marion Maréchal-Le Pen ne soit pas l’arbre qui cache la forêt. Il faut craindre que cette voie ni-droite ni-gauche trouve ses limites très vite et tarisse le courant encore timide en provenance de la droite de l’UMP. L’avenir nous le dira.
François Teutsch