Publié le : 09 mars 2015
Source : bvoltaire.fr
Nicolas Sarkozy en fit son maître à penser en matière de politique étrangère. Manuel Valls l’a sacralisé en penseur officiel du régime sociétaliste et de la France d’après. Il s’agit bien entendu de Bernard-Henri Lévy, le Machiavel des petits communicants politiques qui détruisent consciencieusement la souveraineté nationale et l’image de la France à l’étranger.
Pourquoi cet homme qui ne vend que très peu de livres et n’a jamais été considéré comme une référence universitaire est-il perpétuellement sur le devant de la scène politico-médiatique ? Pour le chaos qu’il a semé en Libye et en ex-Yougoslavie ? Ou pour ses amitiés avec les derniers (et les petits) représentants du pouvoir exécutif ? Nul n’aura jamais la réponse à cet insondable mystère postmoderne, mais une chose est certaine : l’homme n’en mérite pas tant.
Michel Onfray est tout au contraire un philosophe qui a le mérite de penser hors des clous et d’appliquer ce qu’il professe. Homme de la première gauche, et non de la deuxième comme messieurs Valls et Lévy, il se fait le chevalier des sans-grade et des oubliés car il a encore à cœur ses origines modestes. Lucide, Michel Onfray a déclaré préférer une analyse juste d’Alain de Benoist à une analyse injuste de Bernard-Henri Lévy, et une analyse juste de Bernard-Henri Lévy à une analyse injuste d’Alain de Benoist. Une réflexion qui serait restée au stade de l’anecdote dans n’importe quel pays démocratique ; sauf que nous n’en sommes plus tout à fait là et que l’« esprit du 11 janvier » n’a pas inspiré tout le monde, à commencer par ses inventeurs.
Il n’en a pas fallu plus au Premier ministre pour se fendre d’une déclaration outrée sur le philosophe normand nieztschéo-proudhonien. Pensez-donc qu’un Premier ministre en exercice a accusé un philosophe plébiscité par les Français de « perdre les repères » pour avoir simplement préféré l’éthique de l’intellectuel à la dialectique éristique des propagateurs officiels du bien universel. Sur le plan moral, on constatera donc que l’ingérence guerrière (complémentaire de l’ingérence culturelle du gouvernement) est plus valorisée par le gouvernement que les écoles populaires de Michel Onfray ou la discrète application d’Alain de Benoist. C’est ainsi que les nations s’achèvent, et les histoires des hommes s’arrêtent : lorsque la transgression devient la norme.
Ezra Pound l’avait bien expliqué : « On identifie tout de suite le mauvais critique à ce qu’il commence par parler du poète et non du poème. » L’œuvre de Bernard-Henri Lévy restera à jamais frappée de l’échec de sa pratique politique, et du traitement honteux qu’il réserva au dernier grand philosophe français, Gilles Deleuze, qu’il jugea non pour ses œuvres mais pour sa personne. En cela, il ne se distingue pas de son ami Manuel Valls. Nonobstant l’acharnement de certains à restreindre la liberté d’expression, les digues de la pensée unique cèdent sous les assauts du réel. Merci à Michel Onfray d’y contribuer.
Gabriel Robin