Publié le : 13 mars 2015
Source : bvoltaire.fr
Le Financial Times l’avait désigné en 2012 comme l’un des pires ministres des Finances des pays de l’Union européenne quand il sévissait au sein de l’indolent gouvernement Ayrault. Véritable panier percé, Pierre Moscovici avait alors dynamité la dette publique, qu’il fit passer en l’espace d’un an de 85,8 à 90,2 % du PIB. Mais pas de quoi s’affoler pour autant car, nous assurait-il, elle se mettrait à baisser dès 2015. Nous attendons de voir ses prédictions se concrétiser avec une vive impatience.
Évincé de son ministère, Pierre Moscovici a vu ses médiocres résultats récompensés par une nomination au très lucratif poste de commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires où, moyennant une rétribution de 24.000 euros mensuels, il peut désormais venir reprocher ses déficits au pays qu’il a lui-même contribué à plomber. Elle est pas belle, la vie ? Et il ne s’en prive pas, le coquin : « Si les sanctions sont justifiées, elles seront utilisées », prévient-il. « L’effort de réformes de la France est indéniable. Mais il n’est pas suffisant pour réduire les déséquilibres de l’économie. » Il appelle de ses vœux « un plan de réformes détaillé, ambitieux » et insiste sur la nécessité de réaliser « rapidement » des « économies supplémentaires ». À commencer par dégoter, avant le 10 juin, les 4 milliards d’euros que réclame Bruxelles pour réduire le déficit structurel.
Parvenu à arracher à l’Union européenne un troisième délai de deux ans pour ramener enfin son déficit public sous les 3 % de PIB, Paris est sommé, en échange, d’amorcer des réformes en profondeur : il s’agit tout de même d’élaguer les dépenses de 50 milliards d’euros d’ici à 2017… auxquels pourraient s’ajouter 30 autres milliards, Bruxelles jugeant insuffisant le montant initial. Emmanuel Macron s’oppose toutefois à cette éventualité, effrayé qu’un excès d’économies casse le peu de croissance qui subsiste. Une position qui n’est pas sans faire écho au « Il n’y aura pas de plan d’austérité, pas d’objectif impérieux de satisfaire à un chiffre » prononcé deux ans plus tôt par un certain Pierre Moscovici, avant son lavage de cerveau bruxellois.
Reste que le gouvernement risque d’être confronté à des choix cornéliens pour tenir ses engagements : réformes du marché du travail ? Des 35 heures ? Des retraites ? De l’assurance chômage ? Il faudra bien tailler quelque part et ce sont, une fois encore, les plus fragiles qui paieront les pots cassés, ceux qui n’ont pas la chance d’être recasés comme qui rigole et d’avoir une retraite garantie de 4.500 euros pour leurs vieux jours. Mais François Hollande peut aussi décider d’en faire le moins possible pour ne pas carboniser les bribes de popularité dont il jouit encore, et de se reposer sur l’alignement prétendument favorable des planètes économiques (baisse de l’euro, des taux d’intérêt, du prix du pétrole, démarrage du quantitative easing de la BCE) pour faire frémir la reprise.
En outre, comme l’explique Jacques Sapir, si le gouvernement « appliquait des mesures visant à réduire le déficit, ceci provoquerait une contraction très forte de l’économie française qui perturberait très fortement l’économie européenne ». La Commission n’aurait donc pas intérêt à brusquer les efforts hexagonaux, et les réprimandes du commissaire Moscovici, cigale devenue fourmi, relèvent sans doute plus de la simple formalité que du recadrage musclé.
Eloïse Gloria