Publié le : 22 mars 2017
Source : dedefensa.org
Ceci doit-il être considéré comme un signal ? Il s’agit de la parution d’un article US qui reprend des informations diffusées par Le Figaro, le 17 mars, sous la plume d’Ivan Rioufol selon lequel des “sondages secrets” circulant là où ils le doivent, “sous le manteau”, donneraient à Marine Le Pen près de 34% au premier tour (« Trêve de plaisanterie: ces bravoures d’opérette ne pèsent rien, bien sûr, devant la colère française. C’est elle qui, il y a quinze ans, avait mené par surprise Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle (16,86 % des voix). Aujourd’hui, sa fille double ou presque le score au premier tour, dans des sondages qui circulent sous le manteau… »). Suivant un des parcours habituel de la presse antiSystème, l’article US se réfère également à un article de RT-français du 17 mars, qui reprend l’article de Rioufol. L’article US est d’un site pro-Trump, TheGatewayPunfit.com le 20 mars (21 mars pour nous), suivi par ZeroHedge.com le même 21 mars, ce qui lui assure une très forte diffusion :
« An editorialist at French daily, Le Figaro, has alluded to secret polling data which show the Front National’s Marine LePen scoring above 30% of intentions to vote in the first round of the French presidential election. Surveys in the public domain consistently have populist LePen ahead of her rivals in the first round, at 26-28% of intentions to vote but losing to whichever rival she faces in the second. A score of above 30% in the first round, however, would significantly boost her chances of continuing to victory on May 7th.
In his recent article on the failing efforts of the media and political classes to thwart LePen’s continued rise, editorialist Ivan Rioufol cites ‘sous le manteau’, or hidden surveys in circulation which show LePen likely to score double her father, Jean-Marie LePen’s 2002 score of 16.86%. The politically correct ‘Maginot line’ of France’s elites can no longer hold out against the popular anger of the French public, Rioufol writes, arguing that the threats by leftist intellectuals and celebrities to quit the country in the event of a LePen victory are actually boosting her campaign. Likewise for scare-mongering media warnings on a ‘return to the 1930s’.
The French media and political establishment are now openly contemplating a LePen victory, with frequent reference to the Front National ‘at the gates of power’, an eventuality until recently considered impossible. Outgoing president, François Hollande, who describes it as his ‘final duty’ to keep LePen from winning, and who is actively campaigning with government ministers in Front National strongholds to keep LePen from power, has recently admitted that she may win. Privately, Hollande is said to fear that LePen’s support is under-estimated in the opinion polls and that the momentum of a high score in the first round could make it difficult for any rival candidate to beat her in the second.
With five weeks to go until the first round of voting on April 23rd, the main candidates will face-off in a televised debate tonight in Paris, to be broadcast on France’s TF1 and LCI television. The candidates will debate on security and immigration, the economy and France’s place in the world. With the campaign unpredictable and fast-moving, and a sense that this is a pivotal moment for France, the debate will likely attract high viewership and be the subject of Tuesday’s front pages. »
L’hypothèse de la victoire de Le Pen est d’ores et déjà une hypothèse sérieuse de commentaire prévisionnel, sinon l’hypothèse la plus largement commentée et considérée, comme le montre une autre information de ZeroHedge.com du même 21 mars sur les réactions du marché en cas d’une telle victoire. L’intérêt de ces développements se situe, selon certaines indications circulant under the table à Washington D.C., sur ce que pourrait être, ou ce que serait déjà l’attitude de l’administration Trump, ou disons pour être plus précis, du “camp-Trump” dans l’administration puisqu’il apparaît évident que le président n’a pas tous les pouvoirs en main. (En effet, le contrôle de la puissante bureaucratie washingtonienne est toujours l’enjeu d’une bataille souterraine acharnée entre Trump et son “opposition”.)
D’autre part, il apparaît que la publication de Rioufol est sortie du seul circuit de la communication et a été intégrée par le “camp-Trump” comme une perspective politique majeure. Le président est naturellement favorable à Le Pen, d’abord et impérativement pour satisfaire son socle de communication du point de vue d’une sorte de solidarité transnationale entre mouvements populistes ; mais également à cause de l’orientation anti-européenne de Le Pen, et surtout parce que Le Pen est favorable au rétablissement d’un néoprotectionnisme dont on commence à comprendre depuis ce week-end qu’il est l’axe majeur de la politique générale de Donald Trump. Cette appréciation essentielle place de facto les deux pays dans une même position de rupture ou de confrontation c’est selon avec l’Allemagne.
On comprend alors également que l’hypothèse (voir Rioufol/Le Figaro) selon laquelle Marine pourrait avoir devant elle un boulevard vers la présidence au sortir du premier tour (notre “boulevard Le Pen”) est pour Trump de la première importance. De ce point de vue, l’élection présidentielle française, évidemment importante en soi pour n’importe quelle administration US, devient d’une importance opérationnelle directe fondamentale pour Trump. Cet article repris dans la presse antiSystème US constitue symboliquement la prise en considération nécessaire d’une question importante, qui est de savoir si les USA vont intervenir ou pas, indirectement et du point de vue de leur influence, notamment occulte, dans les présidentielles France-2017 ; et il cette prise en considération vaut sur la durée, au moins jusqu’au premier tour, puisqu’il y est question de “sondages secrets”, donc non soumis à confirmation, mais qui se nourrissent pour leur crédibilité du soupçon permanent existant désormais à l’encontre des sondages “officiels” dont le public est bombardé, au-delà de la couverture de quelque manteau que ce soit. Dans ce cas, la perception, l’hypothèse à partir de cette perception, etc., comptent bien plus que le crédit de l’univers statistiques pour fixer la stratégie et les décisions qui l’accompagnent.
L’intérêt de Trump pour les présidentielles françaises s’est renforcé de deux circonstances qui l’ont touché directement et ont accru sa vindicte contre le parti européistes-globaliste. Il a été particulièrement furieux de deux initiatives, la première des restes du président-poire avertissant contre une interférence étrangère dans l’élection, inspirée évidemment de la narrative démocrate/globaliste anti-Trump sur l’intervention russe dans USA-2016 ; la seconde du candidat Macron, affirmant que des hackers russes étaient intervenus contre son site officiel, reprenant pour son compte et à son niveau la même narrative ; en un sens, Hollande se prenant pour Obama et Macron pour Clinton, deux adversaires personnels de Trump… Cela est pour dire que l’attention du président US, toujours difficile à capter lorsqu’il ne s’agit pas d’affaires purement US, s’en est trouvée renforcée. Pour lui, aujourd’hui, la présidentielle France-2017 a bien autant sinon plus d’importance que le Brexit. Tout cela n’était pas dans l’esprit volage du président lorsque Marine Le Pen est venue se balader à New York City, avant l’inauguration du nouveau président, dans l’espoir vain de rencontrer des gens d’importance de la nouvelle administration, sinon Trump lui-même. Les temps ont changé, et les nouvelles venues de Rioufol et du Figaro ont très certainement atteint la table du président, dès lors qu’elles étaient sous la forme d’un article en langue indigène, publié dans la presse antiSystème US.
Il y a eu bien des sarcasmes lorsque Trump a accusé l’administration Obama de l’avoir fait “espionner” [écoutes téléphoniques et électroniques] durant sa campagne et que la chose a amené aussitôt une déclaration d’inconnaissance, pour sa part et pour ses services, du directeur du FBI Comey. La “presse de référence”, – NYT et WaPo en tête, – a glosé dans le chef de ses sarcasmes habituels à propos de ce président qui préfère Breitbart.News à la CIA pour s’informer. D’une part, on comprend assez bien la démarche de Trump quand on sait le sentiment de la CIA et autres “organes” à son encontre, et la qualité des informations qui lui seraient alors transmises ; d’autre part, il a peut-être encore moins tort que cela, objectivement parlant, lorsqu’on fait le compte de l’Himalaya de sottises, d’erreurs, d’informations détournées et distordues, de narrative, etc., que la plupart de ces services US accumulent même en étant assurés eux-mêmes de très bien faire, spécialement depuis 9/11. Aujourd’hui, à condition d’une certaine expérience, d’instruments de recoupement et d’une bonne intuition, la presse-antiSystème et les réseaux qui vont avec sont le meilleur outil de connaissance de l’information disponible aujourd’hui parce qu’ils ont comme références négatives et antagonistes tout ce que le Système produit de narrative faussaires.)
Ces circonstances étant exposées, et le climat complètement incontrôlable et imprévisible des élections étant mis en évidence, se pose pour Trump la question de l’usage des énormes moyens d’influence US en France (agents d’influence, réseaux, moyens de pression, etc.) alors que la campagne France-2017 entre dans sa phase active. Pour les USA, la situation est sans précédent, puisque leur propre pouvoir est divisé, avec une direction centrale dans le sens qu’on sait, et une “opposition” diffusée dans divers services, agences, départements, bureaucraties, etc. ; alors que la division au sein des candidatures se fait également, en France, également selon des lignes d’opposition similaires et que la détermination de la vérité-de-situation est extrêmement difficile au lieu de la situation d’un résultat “connu d’avance” réduit à des candidats-Système qu’on avait en général. D’habitude, cette influence US s’exerçait disons comme un automatisme, la ligne centrale de l’administration et celle du Deep State s’accordant jusqu’à coïncider dans une identification quasi-complète, quel que soit le parti au pouvoir à Washington D.C. puisqu’il n’était question jusqu’ici que de deux “ailes” avec quelques différences d’un “parti unique”. Cette habitude-là n’est plus de mise.
Il est ainsi intéressant de noter qu’un certain nombre de personnalités, d’intellectuels d’influence, etc., français et surtout parisiens, qui ont l’habitude bien ancrée de suivre la ligne atlantiste et washingtonienne, vont se trouver confrontés à de douloureux dilemmes. Ces divers pions qui ont l’habitude de la rectitude des intérêts US et d’une machine bien huilée pour dispenser les consignes, se trouvent désormais devant une division sans précédent dans cette même machine washingtonienne, qui rencontre le caractère tout à fait nouveau d’un aspect fondamental de la division mise en évidence par l’élection France-2017 (disons pour faire bref globalistes contre souverainistes). Ils vont effectivement rencontrer cette division chez leurs interlocuteurs US, parce qu’une partie du personnel US en villégiature à Paris représente les positions traditionnelles (globalistes), tandis qu’une autre partie, qui est en train d’être renforcée de toute urgence, est porteuse de la nouvelle tendance du trumpisme, qui favorise la faction souverainiste. Même à l’intérieur de certaines agences, on retrouve cette opposition ; par exemple à la CIA, où une opposition aux menées anti-Trump héritées de l’équipe Brennan-Obama se fait de plus en plus sentir.
Quoi qu’il en soit, on doit considérer qu’il s’agit là d’une façon de voir la “politique étrangère” ainsi que la “question européenne” entrer implicitement dans le débat jusqu’ici noyé dans “les affaires” de cette présidentielle France-2017 dont on ne cesse de répéter qu’elle n’est à nulle autre pareille. Elle l’est d’autant moins que, dans ce cas, on serait devant une situation également “à nulle autre pareille” où l’ironie suprême verrait disons le “parti souverainiste”, traditionnellement farouchement antiaméricaniste, se satisfaire assez bien de pressions extérieures (US) occultes et indirectes mais puissantes, qui pourraient s’exercer en bonne partie, cette fois contre disons le “parti globaliste”, jusqu’alors d’un proaméricanisme sans faille depuis des décennies, pratiquement depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. D’une certaine façon, on peut dire que, quel que soit le résultat des présidentielles France-2017, quelque chose de fondamental est en train de changer, en France même, dans les relations entre l France et les USA, et dans tous les nombreux facteurs qui dépendent de ces deux situations. tout se passe, – cela n’est pas la première fois que nous faisons cette remarque, – comme si les effets des événements précédaient les événements eux-mêmes, jusquà la possibilité, dans une sorte de retournement du temps, de les influencer eux-mêmes…
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