Publié le : 11 février 2013
Source : bvoltaire.fr
Les amateurs peuvent être sympathiques s’ils montent un groupe de rock ; beaucoup moins quand ils forment un gouvernement. Ainsi, Manuel Valls à propos de l’assassinat de l’opposant tunisien Chokri Belaïd : « Il y a un fascisme islamiste qui monte un peu partout, mais cet obscurantisme doit être évidemment condamné puisqu’on nie cette démocratie pour laquelle les peuples libyen, tunisien, égyptien se sont battus. » Hormis la langue plus qu’approximative, quelques remarques.
Quand on se prétend ministre de l’Intérieur, en cas de meurtre, on attend la fin de l’enquête avant de désigner les coupables. Et, vu l’intitulé de son ministère, on ne se mêle pas des affaires de l’extérieur ; il y a le Quai d’Orsay pour ça, dont le patron, Laurent Fabius, tout sauf un amateur, lui, s’est borné à « condamner » le meurtre en question.
Plus inquiétant, la sortie de Manuel Valls, pourtant le plus populaire de nos ministres, n’a pas manqué, comme c’était évidemment prévisible, de faire descendre une bonne partie du peuple tunisien dans la rue pour y scander des slogans antifrançais ; ce qui est désolant, mais malheureusement compréhensible. « Fascisme », « obscurantisme » ne sont pas des mots qu’on prononce à la légère, surtout lorsqu’ils engagent la parole de la France.
Et là, de deux choses l’une : Manuel Valls est, au choix, ignorant ou idiot. Ignorant parce que le fascisme fut un régime à la fois circonscrit dans le temps et l’espace, de 1922 à 1943 en Italie, et dont Benito Mussolini, qui avait quelques lumières en la matière, affirmait qu’il « n’était pas un objet d’exportation ». Ce même « fascisme, un souffle, un élan, plus qu’une qu’idée » a principalement consisté, dans l’esprit de son créateur, ancien de la gauche du Parti socialiste italien, à rassembler les classes sociales en un projet commun, afin de sortir par le haut de la lutte des classes d’alors. « Fascisme » vient du mot « faisceau », symbole d’unité, hérité du faisceau licteur de la Rome antique. En l’occurrence, strictement rien à voir avec le « fascisme » qu’il soit « islamiste » ou non, le projet des Frères musulmans ayant historiquement consisté, au début du siècle dernier, en un projet nationaliste visant à se débarrasser de l’occupant européen tout en cherchant à concilier impératifs religieux et entrée dans le monde « moderne ».
Rien à voir donc avec la choucroute ou le couscous ! Ce d’autant plus qu’en matière de « fascisme », Manuel Valls se revendique tout de même d’un Parti socialiste dont l’un des anciens pontes, Marcel Déat, grand rival de Léon Blum, a, lui, bel et bien sombré dans la Collaboration…
Quant à « l’obscurantisme », cet ancien franc-maçon revendiqué – naguère affilié au Grand Orient de France – peut bien railler imams, Coran et mosquées, fort de cet Esprit des Lumières consubstantiel à ces gugusses si rationalistes qu’ils s’affublent, dans des cérémonies à peu près aussi folkloriques que celles des Derviches tourneurs, de titres tels que « Prince du royal secret », « Chevalier du Serpent d’airain » et autres « Sublime chevalier élu »…
Autre hypothèse, Manuel Valls sait tout cela et il s’agit seulement d’un idiot. Qui insulte sciemment un peuple ayant majoritairement voté pour Ennahda, filière tunisienne des Frères musulmans, dans des élections ayant paru être des plus régulières, en les traitant de « fascistes » et « d’obscurantistes », termes étant là utilisés comme des injures. Et attise les braises d’un feu qui n’en avait pourtant pas besoin. Valls, idiot, c’est fâcheux. Mais Valls irresponsable, c’est plus dramatique, puisque ridiculisant la France, son gouvernement, son peuple.
Manuel Valls ? Dégage !
Nicolas Gauthier
