Publié par : 13 janvier 2014
Source : fr.novopress.info
Vous avez un parcours atypique, venant de la gauche. Quelle est l’origine de cette évolution vers cette prise de conscience patriote ?
Pour ma part, je n’ai qu’une seule nationalité. Si on me retire ce pays, je suis foutu, j’ai tout perdu, je n’ai plus qu’à mourir, sauf à quémander un statut de réfugié et à entrer dans un processus d’immigration. Or, on est en train de me retirer ce pays, en le faisant disparaître, ainsi que sa qualité de vie, dans ce que l’on appelle la globalisation, le « village global » sans frontières, autrement dit le capitalisme mondialisé. Le but de cette manœuvre, c’est la fin des patries et « l’immigration pour tous ». Quand on sera tous des immigrés, le Capital aura gagné. Nous ne serons plus en position de nous défendre, à aucun niveau, et nous n’aurons plus qu’à disparaître. En effet, l’immigration n’est elle-même que l’outil d’un programme génocidaire global appliqué dans divers pays, dont le nôtre. La destruction totale d’un pays et l’extermination physique complète de sa population sont en cours, et c’est en France que ça se passe. Ce génocide a lieu ailleurs également, le capitalisme étant génocidaire par nature, comme l’indique Garry Leech, mais c’est ici que je vis et que je me retrouve le dos au mur, c’est donc ici que je dois me battre pied à pied pour ma survie, comme tous les habitants de ce pays, même si tous ne l’ont pas encore compris. La situation m’a sauté aux yeux quand j’ai vu ce que l’oligarchie faisait du référendum de 2005 sur le Traité établissant une Constitution pour l’Europe : les Français votent « Non » à un approfondissement de l’Union européenne, mais l’UMPS et la Commission européenne se sont empressés de trahir ce résultat car il contredisait leurs objectifs. À ce moment-là, nous avons eu la preuve éclatante que les frontières nationales étaient bien le seul obstacle sérieux au rouleau compresseur capitaliste.
Ma ligne directrice en politique, c’est donc l’anticapitalisme. Pourquoi ne suis-je pas au NPA dans ces conditions ? Parce que je suis un anticapitaliste cohérent, ce qui me conduit à dépasser certains clivages médiatiques. Il faut œuvrer à la « coagulation » des forces antisystème, vers le nouveau Conseil national de la résistance, le grand rassemblement des « nonistes » de 2005, tous unis contre l’ennemi commun, l’ennemi du genre humain, soit la dictature des banques et la barbarie ultralibérale mondialiste et cybernétique. Pour ce faire, il faut de nouveaux concepts, qui proposent un redécoupage dans le réel et qui permettent de recomposer de nouvelles alliances. À cette fin, je propose le « nationalisme permaculturel », appuyé sur la théorie féministe du Care, c’est-à-dire la notion de « prendre soin » de son environnement humain et matériel de proximité, selon la formule « Charité bien ordonnée commence par soi-même ».
La patrie est en danger. Toutes les patries sont en danger. Qu’est-ce qu’une patrie ? C’est un espace de stabilité. Aujourd’hui, c’est la possibilité même d’une stabilité quelconque qui est en danger. Le constat de cette déstabilisation et expatriation générale est purement empirique et précède même les idées politiques. En effet, quand on regarde les choses d’un point de vue systémique, on voit que le capitalisme déstabilise et accélère tout ce qu’il touche. Il provoque de l’entropie, c’est-à-dire du désordre, partout où il passe. En un mot, le capitalisme c’est le chaos. C’est d’ailleurs ce qu’en disent Deleuze et Guattari dans « L’anti-Œdipe » mais pour le célébrer, comme des « gauchistes » irresponsables, dans une dialectique étrange entre territoire et déterritorialisation qui recoupe celle entre l’enracinement et le déracinement. À l’opposé du chaos deleuzien, les processus vitaux ont besoin de stabilité et de lenteur, donc d’enracinement, pour se développer normalement. Les sociétés traditionnelles, précapitalistes, offrent des conditions de vie lentes et stables, alors que les sociétés dites progressistes, qui apparaissent toujours à la suite d’un traumatisme fondateur qu’on appelle une « révolution », accumulent les ruptures et les changements rapides.
En fait, la dualité entre enracinement et déracinement est transversale à la Droite et à la Gauche. C’est une structure croisée, chiasmatique. Il y a effectivement une Gauche culturelle, deleuzienne et anti-Œdipienne, qui déracine mais il y a aussi une Gauche populiste et patriote qui enracine, au moyen des nationalisations économiques (qui font hurler les libéraux) ou de diverses formes de relocalisation, dont certaines figures historiques furent par chez nous Simone Weil, Georges Sorel, Proudhon, Édouard Berth (cf. le dernier livre d’Alain de Benoist), et ailleurs Hugo Chavez et les Gauches latino-américaines ; et il y a une Droite traditionnaliste, donc précapitaliste et qui enracine, mais il y a aussi une Droite libérale et antipatriote, qui déracine au moyen d’un immigrationnisme délirant et qui était officiellement au pouvoir en France jusqu’en 2012.
Vous accordez une grande importance à l’ingénierie sociale, c’est-à-dire aux méthodes de contrôle social (stratégie de la tension, mind control, tittytainement, etc.). Pensez-vous qu’une guerre psychologique est à l’œuvre contre les peuples et la démocratie ?
Cette guerre psychologique à l’œuvre contre les peuples et la démocratie, nous en avons les preuves. J’en ai rassemblé un certain nombre dans mon petit bouquin, mais il n’y a qu’à se pencher pour les ramasser en sources ouvertes sur Internet ou dans l’expérience directe de certains milieux socioprofessionnels. De plus, les méthodes de contrôle et d’ingénierie sociale sont divulguées dans des manuels qu’on peut acheter en librairie, ainsi que dans des cours et des formations en management, marketing ou sécurité des systèmes. Il existe même un diplôme d’État d’ingénierie sociale, délivré par certaines universités françaises. Il faut voir aussi du côté du mentalisme et des trucs d’illusionnistes et de prestidigitateurs. Au premier abord, tout cela peut sembler innocent ou simplement intéressé, mais dès que l’on creuse, on voit que c’est redoutable. Quand on maîtrise ces techniques de modification du comportement, on peut arriver à tuer quelqu’un en le poussant au suicide, donc en gardant les mains propres. C’est le « crime parfait », très exactement ce qui est appliqué dans les sociétés de masse occidentales. Les deux grands axes de la guerre psychologique qui nous est menée pour nous pousser au suicide collectif sont l’individualisation et la culpabilisation. Le but est d’en finir avec notre envie de vivre. Tous les êtres vivants sont animés par un instinct de conservation. Cet instinct de conservation est l’ennemi de l’oligarchie ; c’est cet instinct de conservation que l’oligarchie travaille à déprimer, affaiblir, culpabiliser, dénaturer, inverser, de sorte à pousser les peuples à s’autodétruire, sans qu’elle ait besoin de les frapper directement. L’oligarchie doit fabriquer le consentement du peuple à sa propre disparition en le convainquant qu’il est mauvais et que la Terre ne s’en portera que mieux s’il la quitte. Depuis Mai 68, la France est un véritable laboratoire à ciel ouvert de toutes ces techniques d’ingénierie sociale négative et de destruction de l’instinct de conservation.
Pour comprendre ces phénomènes dans leurs propres termes, il faut laisser tomber la grille de lecture classique des sciences politiques, qui est complètement biaisée et caduque depuis au moins deux siècles. Les théories politiques se répartissent en deux grands ensembles, libéral et marxiste, mais procèdent d’un tronc commun : la croyance en des lois historiques autonomes que personne ne maîtrise. En réalité, le développement des sociétés modernes depuis le XVIIIème siècle est tutoré de manière complètement artificielle. Quand on regarde de près, on voit que le processus est maîtrisé et dirigé : c’est une démolition contrôlée. À ce stade, on sort de la fausse alternative entre libéralisme et marxisme puisque l’on se rend compte que leur présupposé commun, l’autonomie des lois historiques et socioéconomiques, est faux. On se retrouve alors projeté par-delà Droite et Gauche, comme dirait Arnaud Imatz.
Dans un entretien récent, vous avez déclaré que les notions de Droite et de Gauche étaient dépassées, et qu’il ne restait qu’un combat pro-vie contre pro-mort…
Le clivage Droite/Gauche est devenu définitivement ringard et « has been » avec la Manif pour Tous. Nous avons assisté à un renversement complet de tous les signes et de toutes les significations politiques. Nous avons vu des manifestations de droite contre le capitalisme, et un gouvernement de gauche envoyer les CRS pour cogner sur la bourgeoisie catholique et défendre à coups de matraque la marchandisation libérale du ventre des femmes. Toute la construction du clivage Droite/Gauche a été pulvérisée avec une inversion complète des valeurs et des messages : une Droite conservatrice mais animant un mouvement révolutionnaire au bon sens du terme, contre une Gauche ultra-capitaliste et ultra-répressive. Ceci m’a conduit à dire sur Radio Courtoisie que la Droite découvrait enfin le capitalisme. Il se peut que cela ait déplu, mais peu importe, il y a une situation d’urgence nationale et il faut dire les choses comme elles sont.
Pour concrétiser l’union sacrée par-delà droite et gauche, le nouveau CNR que j’appelle de mes vœux à la fin de « Gouverner par le chaos », il faut définir un vocabulaire commun, élaborer des éléments de langage communs qui redéfinissent qui est l’ennemi, qui est l’ami et qui est l’allié. Il faut réécrire la perception des rapports de force en se basant sur le réel, et non plus sur les médias. Pour cela, il faut savoir parler à tout le monde dans sa propre langue, puis faire bouger les gens vers une langue commune en construisant des ponts langagiers et cognitifs. Je fais donc moi-même de l’ingénierie sociale. En effet, depuis des années, je circule de l’ultra gauche à l’ultra droite dans cette perspective de synthèse nationale et de grande jonction à construire. Cela m’est facilité par le fait que je suis extrêmement curieux et que je veux comprendre le monde dans lequel je vis, ce qui me conduit à explorer des milieux sociologiques parfois antagonistes en faisant des « terrains » comme on dit, ce qui suppose d’aller sur place pendant plusieurs années pour faire de l’observation participante. À force, on développe une capacité d’adaptation à tous les milieux, même les plus hétérogènes, et on devient un peu caméléon, un peu Protée. Cette adaptabilité vient aussi de ce que ma formation initiale n’est ni politique, ni militante. C’est d’abord les arts, puis la philosophie avec une spécialisation en épistémologie, ainsi que les sciences humaines et sociales. Aujourd’hui, j’ai une bonne connaissance pratique plus que théorique de tout l’éventail politique.
La Droite et la Gauche ont donc encore un peu de signification, mais uniquement au niveau psychologique, selon une dialectique ouverture/fermeture, et avec beaucoup de guillemets : la psychologie de droite est plutôt « fermée », quand la psychologie de gauche est plutôt « ouverte ». Dans un rapport de forces, il vaut mieux être de droite, fermé, pour mieux se défendre et contre-attaquer ; en revanche, pour collecter et traiter de nouvelles informations, il vaut mieux être de gauche et ouvert. Dans l’idéal, il faut un juste milieu. Les systèmes vivants ont besoin de relations avec leur environnement, donc d’ouverture, mais aussi de fermeture, sinon, ils se dissolvent et meurent. Un système entièrement ouvert, sans délimitations, dépourvu de frontières, disparaît, tout simplement. La demande de fermeture et de protection des mouvements nationalistes est donc parfaitement légitime. L’instinct de conservation pousse naturellement à la fermeture. Toutes les voix qui nous demandent de nous ouvrir toujours plus au monde, à l’Autre, à l’étranger, aux immigrés, aux minorités, flattent en nous la « belle âme », moralement généreuse et intellectuellement tolérante, mais lancent en fait un hameçon d’ingénierie sociale pour fabriquer le consentement à la mort, sorte de dressage au renoncement à l’instinct de conservation, lequel commande évidemment de se protéger.
Il faut l’avouer, dans l’espace francophone, la plupart des organisations d’extrême gauche se sont faites largement infiltrer et noyauter à cause de leur ouverture justement, et sont maintenant pilotées en sous-main par la Commission européenne, Tel-Aviv et Washington. Les « antifascistes » français ont produit une série de tracts et d’autocollants écrits directement en anglais (« Support your local antifa », etc.), ce qui évite à leurs agents traitants du Mossad et de la CIA de se fatiguer à apprendre notre langue ; en outre, vous aurez remarqué qu’ils n’attaquent jamais leurs maîtres susnommés, pourtant de vrais fascistes, mais vont s’en prendre à Soral, Dieudonné, ou au Front National, qui n’ont pourtant aucune responsabilité dans la « Nakba hexagonale » que nous subissons. Les représentants de la Gauche encore indépendante et capable d’envisager une fermeture protectionniste souverainiste sont généralement attaqués par les « antifas » comme étant des « rouges-bruns », pour les dénigrer : Étienne Chouard, Michel Collon, Jean-Claude Michéa, Jacques Cheminade, Jean-Pierre Chevènement, le Parti ouvrier indépendant, le Réseau Voltaire, le Pôle de Renaissance Communiste, le site « Le grand soir », la mouvance nationale-révolutionnaire comme « Rébellion » à Toulouse, des sections locales de syndicats, du PCF ou d’Attac, souvent désavouées par les dirigeants (on se souvient de René Balme). Pour ma part, j’ai encore un pied à gauche, dans le milieu associatif de la relocalisation et de la permaculture, donc dans la branche environnementaliste, qui est plus anarcho-écolo-décroissante-luddite-survivaliste-situationniste que proprement marxiste, et à laquelle on pourrait associer les gens de Tarnac ou de Notre-Dame-des-Landes. Des gens courageux et intelligents mais qui doivent comprendre que leur cause est perdue si le sommet du Pouvoir ne leur est pas favorable. Leur négligence de la question de l’État-nation les perdra, mais il faut leur tendre la main quand même, ce ne sont pas des ennemis.
Ce qui me fidélise à ce milieu, au-delà des idées ou des personnes sympathiques, c’est la perspective du travail manuel. Ceci dans l’optique d’un questionnement anthropologique sur ce que signifie « appartenir à l’espèce humaine ». La condition humaine normale, c’est le travail manuel au sein de petites communautés rurales où les rôles et les identités sont spécialisés en fonction des sexes et de l’âge (d’où le complexe d’Œdipe, structure mentale hétéro-normative au fondement de toute culture). Ce mode de vie a constitué 99% de l’histoire de l’humanité, jusqu’à l’exode rural dans la deuxième moitié du XXème siècle. Ce mode de vie est donc la norme dans l’histoire de l’espèce ; ce qui s’en écarte, notamment depuis la deuxième moitié du XXème siècle, relève simplement de l’anomalie pathologique. Pour bien le comprendre, il faut le vivre personnellement, l’expérimenter sur le terrain, le sentir physiquement. Quand on doit travailler un sol et y faire pousser de quoi subsister, les tâches se répartissent spontanément en fonction des aptitudes de chacun. Les faux problèmes entre hommes et femmes, entre jeunes et vieux, disparaissent. On n’a pas le temps pour ce genre de bêtises car il y a des choses plus urgentes à faire. On voit alors concrètement et en acte ce que c’est qu’un organisme social, un collectif vivant : c’est la focalisation de toutes les énergies sur un objet matériel (village, terrain) dont il faut « prendre soin » en commun. La survie physique d’un groupe dans un environnement hostile ou indifférent a façonné au fil des siècles les invariants de notre espèce. Il existe en effet des constantes anthropologiques, dérivées des impératifs de la survie physique, dont il est impossible de s’extraire sans s’autodétruire. Transgresser ces constantes anthropologiques revient à préparer le génocide de l’espèce humaine et son remplacement par une espèce non humaine, clonée, robotisée, zombifiée. C’est la voie suivie depuis quelques décennies par un monde occidental en pleine « tertiarisation » et qui tente d’imposer une nouvelle conception de la vie, de type ultralibéral, entièrement monnayable, mais surtout détachée du corps et sous contrôle scientifique et technologique total : OGM végétaux, animaux et humains, brevetage du vivant, Catalogue des semences autorisées (ordonné par l’UE), identité virtuelle, confusion des Genres, « mariage homo » (toujours illégal en France à cause de votes truqués à l’Assemblée), GPA, PMA, marchandisation de l’humain et location du ventre des femmes (Pierre Bergé), contraception et avortement de confort, eugénisme, euthanasie des non-productifs, vieillards et malades, RFID pour tous… En un mot, le « meilleur des mondes » transhumaniste de Aldous Huxley. Avec la relocalisation, j’essaye de rester en contact avec mes « origines humaines », c’est-à-dire de cul-terreux, qui doit tout fabriquer avec ses mains et qui ne passe pas son temps devant un écran ou un micro-onde.
Par ailleurs, vous avez fait plusieurs fois référence aux Évangiles. Est-ce que votre évolution politique s’est accompagnée d’une évolution religieuse vers le christianisme ?
J’ai reçu une éducation catholique mais je n’avais jamais lu la Bible in extenso avant l’an dernier. Je l’ai donc fait et cela a renforcé l’intérêt que je porte à cette religion, qui est une sorte d’amélioration dialectique du judaïsme. On ajoute l’Amour à la Loi. Le christianisme possède une dimension supra-raciale authentique, à distinguer de l’antiracisme primaire, qui n’est qu’un racisme anti-blanc déguisé, ce que Gérald Pichon a bien vu. On trouve dans le Nouveau Testament une reconnaissance mais aussi un appel au dépassement de l’incarnation, donc de l’apparence physique, dans le rapport à autrui. L’apparence physique ne pense pas, elle ne véhicule aucun message, aucune idée, aucun sens. La photo d’un top-model équivaut au vide sémantique le plus total. La barbarie ultime est là, bien pire qu’Auschwitz. Face au règne de l’image creuse, se tient le Verbe, le logos, le langage, donc le concept, le symbolique, le signifiant et l’abstraction qui nous introduisent à la pensée, à la civilisation et au monde des humains. « Au début était le Verbe », écrit Saint-Jean en incipit de son Évangile. C’est le logos, johannique ou grec, qui doit retenir notre attention, car nous sommes avant tout des « sujets parlants », comme dit aussi Jacques Lacan. (Avant de pouvoir parler, le bébé est déjà pris dans les filets du Verbe de ses parents, mais s’il ne fait pas sienne cette compétence linguistique qu’on lui tend, il reste profondément handicapé, en attente de devenir un sujet parlant.) Le christianisme oblige à une discipline mentale, c’est une ascèse qui éduque à se concentrer sur ce que les gens disent et pensent, donc sur ce qu’ils ont dans la tête plutôt que sur sa forme, donc sur les idées et les concepts, sur les mots plus que sur les choses. On apprend à mettre entre parenthèses l’image du corps, ce qui est le dispositif du confessionnal (ainsi que du divan psychanalytique), où les interlocuteurs ne se voient pas, de sorte à neutraliser les effets parasitaires d’attirance ou de répulsion physique. Pour ma part, quand je parle avec quelqu’un, je dé-visualise et je me concentre sur ce qu’il dit, sur son discours et sa structure, logique ou pas, indexée sur les faits ou imaginaire, etc. Bref, je ne vois plus vraiment la personne qui est en face de moi, ce qui m’a souvent posé problème dans certains rapports avec l’autre sexe, où le langage ne doit pas être utilisé aussi sérieusement, au risque de voir la demoiselle bailler !
Pour revenir à ce qui me parle dans le christianisme, c’est que quelle que soit notre origine raciale, nous sommes tous appelés à l’universalisme du logos chrétien. L’interprétation haute des monothéismes consiste ainsi à dépasser le fétichisme narcissique de la couleur de la peau ou de la conformation du corps. Certes, le christianisme est moins iconoclaste que le judaïsme ou l’islam, au sens où il n’interdit pas totalement la représentation, mais il nous appelle quand même fortement à la surmonter. On sort ainsi du « tout visuel » et du « tout image » pornographique de la société de séduction et du spectacle. On se protège mentalement de l’orgie iconique de l’audio-visuel et du multimédia, qui n’est qu’un dispositif de domination par la fascination de l’effet miroir des images et des représentations. Cette même société du spectacle véhicule aussi un message d’obligation au métissage, un impératif mélangiste, qui en fait une société de l’indistinction, comme dirait Francis Cousin. C’est une sorte de démarche cabalistique tendant à l’abolition de toutes les différences, sauf celles du compte en banque, évidemment, qui vise en réalité au génocide de toutes les identités, y compris les identités ethniques. Mais cette abolition de l’ethnique n’est qu’une étape, donc inutile de trop se focaliser dessus. Nous sommes déjà passés au-delà de la « question raciale » avec la théorie de la confusion des Genres et le projet d’abolir les différences entre les sexes, puis bientôt entre les espèces avec l’anti-spécisme, jusqu’à l’abolition de la différence entre le vivant et le mort, avec la mode du zombie depuis quelques années. À l’opposé de cette régression cabalistique vers une sorte de chaos originel crépusculaire indifférencié, le christianisme propose un dépassement par le haut des différences et des facteurs sources de conflit. Dans cette perspective de dépassement des conflits, la lecture la plus stimulante que je connaisse des Évangiles est celle de René Girard, qui est parvenu à en dégager le cœur, selon moi. Girard se trompe parfois sur certains points, notamment le caractère historique unique de l’exemple christique. En effet, la mort de Socrate, par exemple, présente une structure similaire à celle du Christ. Mais il faut admettre que l’approche girardienne parvient à montrer que le message de Jésus a effectivement quelque chose de surhumain et d’un peu fou, forcément troublant et qui laisse songeur.
Une fois que j’ai dit ça, je dois ajouter que je ne suis pas croyant. Quelle que soit la religion au pouvoir, judaïsme, christianisme, islam ou pseudo-laïcité franc-maçonne, je vis donc sous domination. Tout ceci ne fait pas de moi un athée militant pour autant. Mon rapport aux religions est le suivant : quand les religions disent vrai, je prends, quand les religions disent faux, je ne prends pas. De ce point de vue, il faut reconnaître que les religions disent souvent vrai sur les questions morales, éthiques, axiologiques, car on y trouve exprimées des constantes anthropologiques, mais qu’elles sont aussi régulièrement invalidées par la méthode expérimentale dès qu’on aborde l’analyse des phénomènes du monde en tant que tel. Au total, on constate qu’il existe des logiques latérales aux religions : ni pour, ni contre, mais à côté, voire ailleurs.
Un local, « la Traboule », le cercle de Précy où vous êtes invité le 16 janvier prochain, mène des actions régulières. Que pensez-vous de l’implantation locale des Identitaires lyonnais ?
Pour tout dire, je ne connais pas bien l’implantation locale des Identitaires lyonnais, mais je me félicite que la démarche identitaire se répande, à Lyon ou ailleurs, car elle propose une entrée dans la seule question importante, la question de l’identité. Une fois qu’on a posé la bonne question, il faut lui trouver la ou les bonnes réponses. Pour traiter convenablement de la question identitaire, il faut une méthodologie scientifique. Les sciences humaines et sociales sont les mieux adaptées pour cela. Le militantisme n’est pas suffisant, car il repose souvent sur des impensés et peut se laisser manipuler par des influenceurs qui travaillent sur une ingénierie identitaire destructrice, notamment dans le Renseignement et à un haut niveau géopolitique. La question identitaire est explosive car lourdement chargée sur le plan émotionnel, il faut donc savoir raison garder et conserver son sang-froid au moyen d’un cadre rigoureux. Pierre Hillard, par exemple, fait un travail important dans ce sens. Notamment, il ne faut jamais perdre de vue que le régionalisme est utilisé par le mondialisme pour attaquer les structures intermédiaires : les États-nations. Le but est toujours le même : le séparatisme. Pour y parvenir, les identités ethniques, culturelles et régionales sont souvent instrumentalisées à leur insu. Il faut donc rendre su cet insu, rendre conscient cet inconscient identitaire émotionnel, pour qu’il ne puisse pas être manipulé à des fins de conflit séparatiste. Il faut donc appliquer la grille de lecture du Renseignement à la question identitaire pour anticiper et dégonfler toute manipulation visant à provoquer et orchestrer un conflit séparatiste sur une base identitaire. Diffuser cette grille de lecture du Renseignement dans les milieux identitaires me paraît une priorité absolue.
En outre, il faut toujours se rappeler une chose : en système capitaliste, ce ne sont plus vos origines ethniques ou culturelles qui définissent votre destin, c’est votre compte en banque, votre pouvoir d’achat, votre capital. Il ne faut donc pas surestimer les causalités identitaires aujourd’hui, car ce sont les causalités socioéconomiques qui s’y substituent dans la définition de nos conditions de vie concrètes et quotidiennes. Les identités ethnico-culturelles ou de genre ne sont vraiment structurantes que dans les modèles précapitalistes. Retour des identités traditionnelles et sortie du capitalisme : ce sont là finalement deux formulations synonymes, deux façons de parler de la même chose et de viser un horizon commun.
Une fois que tout ce beau monde sera coagulé la croûte va tomber d’elle-même laissant la plaie guérie ? Pardon de le dire mais j’aime encore mieux l’agglo et même s’il résiste mal à l’eau. Un bel article tout à fait prenant, et qui fait l’éloge d’un bien perdu, la lenteur. Avec un an ferme pour le lanceur de chat on est arrivé alors aux balbutiements de l’antispécisme. Un bon gars ce M. Cerise, merci, j’ai encore bcp à lire.