Publié le : 03 juin 2012
Source : fr.novopress.info
Il y a le gouvernement… et puis il y a ceux qui décident vraiment. Les ministres doivent le savoir : un pré-conseil des ministres a lieu chaque mardi à l’Elysée. Avec, pour « premier ministre bis », le très sectaire François Rebsamen, qui a choisi de tirer les ficelles et de gouverner dans l’ombre.
Durant sa campagne, le candidat Hollande avait promis: « Je ne recevrai pas à l’Elysée les parlementaires qui me soutiennent. Le rôle des parlementaires, c’est d’être au Parlement. » Un engagement pris devant 10000 personnes le samedi 3 mars à Dijon, la ville dont le sénateur-maire est François Rebsamen. Et d’ajouter, ironique: « Je suis venu vous annoncer, si je suis élu, une grande nouvelle: il y aura donc un gouvernement. » Une façon de marquer sa rupture avec l’« hyper-présidence » de Sarkozy. Mieux vaut en rire… Car en fait de gouvernement, il y en a deux.
Chaque mardi, sans que cela soit mentionné sur l’agenda communiqué par la présidence de la République, un pré-conseil des ministres visant à préparer celui, officiel, qui se tient chaque mercredi, se déroule à l’Elysée en tout petit comité. S’y réunissent Hollande, de proches collaborateurs de celui-ci, issus du Parti socialiste, le premier ministre Jean- Marc Ayrault et… le maire de Dijon, François Rebsamen. Comme l’avait dit Hollande lors du même meeting de Dijon: lui élu, « ce ne sera pas l’Etat PS ». En effet: Martine Aubry ne fait pas partie de ce gouvernement occulte…
Agé de 61 ans, François Rebsamen, outre ses fonctions déjà citées, est le président très puissant du groupe socialiste au Sénat et l’un des proches parmi les proches de Hollande, qui en avait fait le numéro 2 du PS lorsqu’il en était devenu le premier secrétaire. Le quotidien « La Croix » l’avait alors défini comme « le bras armé de Hollande ».
Les francs-maçons en force à l’Elysée
Accessoirement – façon de parler… –, Rebsamen, qui a débuté sa carrière politique chez les trotskistes de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), est membre du Grand Orient de France. Tout comme le président socialiste du Sénat, Jean- Pierre Bel, dont François Hollande vient de piller l’équipe en aspirant cinq de ses membres à l’Elysée – parmi lesquels Pierre-René Lemas, directeur de cabinet de Bel devenu secrétaire général de l’Elysée, et Pierre Besnard, passé de chef de cabinet de l’un à chef de cabinet de l’autre.
Voilà qui va renforcer l’ambiance très « fraternelle » des réunions secrètes du mardi, qui justifient a posteriori l’article que notre confrère François Koch, spécialiste de la franc-maçonnerie, avait publié en janvier dernier dans « L’Express » sous le titre: « Comment les francs-maçons manipulent les candidats. » « Comme Chirac avant lui, Hollande cajole les frères », écrivait notamment Koch dans un tex te qui consacrait une large place à Rebsamen, présenté comme l’un des inspirateurs de la volonté de Hollande « d’intégrer dans la Constitution les principes de la très maçonnique loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat ». Un engagement pris par le candidat socialiste en novembre 2011 au siège parisien… du Grand Orient de France !
On se souvient que, le mercredi 16 mai, l’annonce de la composition du gouvernement Ayrault, prévue pour le milieu d’après-midi, avait été différée d’heure en heure. Il avait fallu attendre 19h30 – juste à temps pour le journal de 20 heures – pour que le secrétaire général de l’Elysée puisse enfin en communiquer la liste. La raison majeure de ce retard? Pendant que les journalistes s’interrogeaient sur les difficultés de dernière heure que pouvait bien rencontrer le chef de l’Etat – les attribuant au refus de Martine Aubry de participer au gouvernement –, François Hollande était en fait en train de négocier avec François Rebsamen !
Un interlocuteur… pour le FLNC
Convoqué à l’Elysée, Rebsamen a passé ce jour-là plus d’une heure et demie avec le chef de l’Etat et le premier ministre! Hollande a fait des pieds et des mains pour qu’il intègre le gouvernement. Au fil de la négociation, le maire de Dijon, qui rêvait du ministère de l’Intérieur, s’est vu proposer de plus en plus d’attributions, jusqu’à un ministère gigantesque: ministre de la Fonction publique, de la Réforme de l’Etat, de la Dé centralisation, de l’Egalité des territoires et des Elections, avec autant de ministres délégués qu’il le souhaitait! Marylise Lebranchu et Cécile Duflot, qui se répartissent ces domaines, vont être contentes d’apprendre qu’elles n’ont été choisies que par défaut… Rebsamen a refusé ce portefeuille, au prétexte, a-t-il assuré aux Dijonnais, que l’exigence de non-cumul d’une fonction exécutive locale avec une fonction ministérielle l’aurait contraint à abandonner la mairie de la ville, ce à quoi il ne pouvait se résoudre.
En réalité, Rebsamen a obtenu plus et mieux. Cet ancien membre du cabinet de Pierre Joxe, le très retors ministre de l’Intérieur de François Mitterrand, a gagné le poste officieux de premier ministre bis et le droit de conserver son mandat de sénateur et son poste de maire ! Chaque mardi matin, a-t-il confié, il « élaborera la semaine politique » avec François Hollande et Jean-Marc Ayrault. Après être passé par le siège du Grand Orient ? C’est là, rue Cadet, que, le 22 janvier 2000, la carrière de François Rebsamen avait failli prendre fin. Ce jour-là, Simon Giovannaï, Grand Maître du GODF, avait reçu « quatre représentants de la direction militaire du FLNC, dont deux poseurs de bombes présumés », pour essayer de trouver un accord politique sur le modèle des accords de Nouméa – négociés, eux aussi, par la maçonnerie. Or « même s’il n’a cessé de le nier, plusieurs participants et témoins confirment que le frère François Rebsamen, […] alors chargé des fédérations au secrétariat national du PS, participait bien à cette réunion »(1)
Destinée à demeurer secrète, cette réunion de cagoulés sera divulguée, sans doute via les services du ministère de l’Intérieur détenu alors par Jean-Pierre Chevènement, opposé à toute négociation avec les terroristes. Simon Giovannaï devra démissionner trois mois plus tard. François Rebsamen, lui, est plus que jamais aux premières loges du pouvoir.
Antoine Vouillazère
(1) François Koch, Le vrai pouvoir des francs-maçons, éd. Express-Roularta, 2009.