Publié le : 15 octobre 2012
Source : lepoint.fr
La Nouvelle Alliance flamande (N-VA), qui prône la division de la Belgique, a réussi une percée aux élections municipales.
Des Flandres à l’Écosse en passant par la Catalogne, le séparatisme ne cesse de gagner du terrain dans une Europe affaiblie par une grave crise économique et sociale. En moins d’une semaine, trois régions ont fait entendre leur différence et manifesté clairement leur aspiration à s’émanciper. Le Parlement espagnol a bloqué mardi dernier l’organisation, par la communauté autonome de Catalogne, d’un référendum sur son indépendance, mais les élections régionales anticipées du 25 novembre pourraient donner la majorité absolue aux séparatistes de Convergence et union (CiU), qui gouverne actuellement avec l’appoint de petits partis.
Dimanche, la Nouvelle Alliance flamande (N-VA), qui prône la division de la Belgique, a réussi une percée aux élections municipales. Son leader, Bart De Wever, paraît bien parti pour devenir bourgmestre (maire) d’Anvers. Et lundi, le chef du gouvernement autonome d’Écosse (le nationaliste Alex Salmond) et le Premier ministre britannique David Cameron ont signé un accord sur les conditions d’organisation en 2014 d’un référendum d’autodétermination en Écosse qui pourrait aboutir à l’éclatement de l’union politique avec l’Angleterre, vieille de trois siècles.
Si l’on ajoute le haut degré d’autonomie déjà atteint par le Pays basque espagnol, seule région du pays à lever son propre impôt sur le revenu et sur les sociétés, et la « Padanie » que rêve d’instaurer la Ligue du Nord dans la partie septentrionale de l’Italie, on réalise l’ampleur des forces centrifuges qui se sont emparées du Vieux Continent.
Bavarois contestataires
Au moment où les États-nations cèdent de plus en plus de pouvoirs à l’Union européenne dans le domaine budgétaire et économique, les revendications et les conflits qui couvaient depuis des siècles dans certaines régions d’Europe redoublent d’intensité. En période de restriction budgétaire, certaines zones riches, comme les Flandres belges ou la Catalogne, ne cachent plus leur irritation de devoir payer pour d’autres provinces moins bien loties du pays. C’est aussi le cas en Allemagne avec la Bavière. Certes, la principale puissance européenne n’est pas menacée de sécessionnisme, mais les riches Bavarois contestent devant les tribunaux la redistribution par péréquation des recettes fiscales.
Cette montée en puissance des sentiments séparatistes ne débouchera pas nécessairement sur l’émergence de nouveaux pays en Europe, car il existe autant de différences que de similarités entre les mouvements séparatistes. Le soutien à l’indépendance de l’Écosse varie entre 30 % et 40 %, une tendance stable depuis des années. Un sondage en septembre indiquait que 43 % des Catalans étaient favorables à l’indépendance totale, et que 41 % y étaient hostiles.
La Catalogne vit en plein paradoxe en demandant l’aide financière du pouvoir central espagnol pour éponger sa dette, alors même qu’elle a des visées séparatistes.
Impopularité des partis traditionnels
Le président du gouvernement catalan, Arturo Mas, souligne que la Catalogne verse plus d’argent à l’Espagne qu’elle n’en reçoit et qu’elle pourrait, en étant indépendante, fournir de meilleurs services en matière de santé et de protection sociale. « Sans un État, la Catalogne ne survivra pas », en conclut-il.
Une victoire en novembre de CiU, la formation de Mas, aboutirait probablement à une renégociation avec Madrid de l’autonomie budgétaire de la province, plutôt qu’à une déclaration d’indépendance. En Écosse comme en Flandre, Alex Salmond et Bart De Wever ont su sortir leur courant de la marge en surfant sur l’impopularité grandissante des partis traditionnels du centre droit et du centre gauche.
Interrogé après son succès électoral, Bart De Wever a exclu l’existence d’une majorité pour l’indépendance en Flandre. « Ce n’est pas à l’ordre du jour aujourd’hui », a-t-il dit.
L’émergence des séparatismes est aussi révélatrice d’un changement de génération au sein du monde politique, incarné sur différents rayons du spectre politique par les Verts, les eurosceptiques ancrés à l’extrême droite, les organisations anti-immigration et des nationalistes qui ont acquis expérience et savoir-faire dans les assemblées régionales et locales. Loin de vacciner les États-nations contre l’éclatement, la décentralisation mise en oeuvre depuis les années 1970 a alimenté les aspirations séparatistes.