Société France

On sait depuis longtemps que le magazine Les Inrockuptibles est à la presse honnête et sérieuse ce que sont Patrick Bruel à la chirurgie cardio-vasculaire ou Daniella Lumbroso aux mathématiques quantiques : une référence absolue et définitivement incontournable.

On connaît par cœur le brouet idéologique si prétentieusement indigeste des Inrocks : moitié gauche caviar, moitié NPA, avec des vrais morceaux de Front de Gauche dedans, notre très gonflant torchon « branché » enfourche systématiquement -de la première à la dernière page et comme d’autres enfilent les perles- tous les vieux canassons défraichis de la bien-pensance de « gôche ».

Ce qui est d’ailleurs très précieux pour tout esprit un peu éclairé : il sert ainsi immanquablement de parfaite boussole inversée, tant il est vrai qu’il suffit de savoir que Les Inrocks ont pris (sur quelque sujet que ce soit) telle position pour être aussitôt et définitivement sûr que la juste mesure et le sens commun trouvent inévitablement refuge dans la position inverse !

Cette constatation se vérifie tous les jours encore un peu plus depuis la nomination (Merci Arnaud, merci Mathieu) d’Audrey Pulvar à la direction du machin. C’est ainsi que le dernier coup d’éclat du magazine, et après ses deux unes « mariage gay friendly », celui dont on cause entre gens bien dans les diners parisiens entre deux lignes de coke, est une pétition « contre le racisme – devoir d’insolence »  de soutien à Saïd Bouamama, militant associatif algérien résidant en France et Saïdou, rappeur du groupe Z.E.P., auteurs pour l’un des textes du délicat livre-album « Nique la France : devoir d’insolence » (2010), pour l’autre des paroles de la chanson éponyme « Nique La France » (voir le clip ci-dessous). Ces deux héros des temps modernes façon Inrocks sont en effet poursuivis en justice pour « injure publique » et « provocation à la discrimination » par l’association AGRIF (d’extrême-drouaaate, nous précise évidemment Les Inrocks dans sa pétition).

Ni une ni deux, Les Inrockuptibles sautent aussitôt sur leur rossinante et montent à l’assaut d’une justice fascisante, d’une police de la pensée libre et iconoclaste, d’une censure ignoble, défendant le droit à l’expression et à la parole libre en démocratie. Car l’heure est grave, je cite la pétition :

« Mais voilà, cela dépasse, choque et insupporte qu’une telle parole puisse être portée, d’autant plus quand elle l’est par ceux qui subissent en premier lieu les politiques racistes et antisociales. Lorsque des Noirs ou des Arabes font le choix de sortir de l’invisibilité et du mutisme afin de décrire la réalité telle qu’elle est – violente, inégale et destructrice – la droite extrême, l’extrême droite ou encore l’État s’emploient à tenter de convaincre l’opinion publique de l’illégitimité de ces discours ».

Bien-sûr, leur hémiplégie démocratique pourtant en l’occurrence aveuglante ne les freine pas un instant dans leur élan outragé. Car leur devoir d’insolence est on ne peut plus à géométrie variable : lorsqu’il s’agissait de poursuivre en justice un Eric Zemmour pour propos « racistes », exiger (un verbe très utilisé chez Les Inrocks et leur clique, on le verra encore une fois plus loin) qu’il soit viré de ses chroniques télévisuelles ou radiophoniques, pour ce qui fut de lyncher un Richard Millet en place publique et le faire éjecter du comité de lecture de Gallimard, faire en sorte que Renaud Camus n’ait plus d’éditeur pour cause de bulletin de vote « Bleu Marine », ou pour conchier Gérard Longuet et son bras d’honneur à la repentance, Les Inrocks ont toujours su répondre présents, ont toujours étés du bon côté du manche, fût-il de pioche en en ces occasions là.

Alors, la libre expression des « Noirs et des Arabes » pour décrire « la réalité telle qu’elle est », parlons-en ! Voici donc le clip et les paroles dans leur intégralité de la chanson du groupe Z.E.P. Accrochez-vous !

Nique la France
Et son passé colonialiste
Ses odeurs, ses relents et ses reflexes paternalistes

Nique la France
Et son histoire impérialiste
Ses murs, ses remparts et ses délires capitalistes

Ca y est, c’est réglé
Maintenant c’est formel
Ca y est c’est confirmé
Par voie ministérielle
Les nazillons sont lâchés
Les bidochons décomplexés
Carte Blanche pour les gros beaufs
Qui ont la haine de l’étranger

Petits bourgeois
Démocrates républicains
Ton pays est puant raciste et assassin
Les lumières des droits de l’homme
Soit disant universels
Un mythe, un mirage, un mensonge officiel

Petits donneurs de leçons
Petits gaulois de souche
Arrête ton arrogance
Arrête d’ouvrir ta bouche
Tu juges, tu critiques
Les arabes et l’Afrique noire
Mais balaye devant ta porte
Regardes toi dans un miroir

Nique la France
Et son passé colonialiste
Ses odeurs, ses relents et ses reflexes paternalistes
Nique la France
Et son histoire impérialiste
Ses murs, ses remparts et ses délires capitalistes

C’que j’en pense
De leur identité nationale
De leur Marianne, de leur drapeau
Et de leur hymne à 2 balles
J’vais pas t’faire un dessin
Ca risque d’être indécent
De voir comment j’me torche
Avec leur symbole écœurant

Affligeant
L’évolution en 60 ans
Regarde à l’assemblée
Il y a que des culs tous blancs
Ils veulent l’intégration
Par la Rolex ou le jambon
Ici on t’aime
Quand t’es riche et quand tu bouffes du cochon

Quand t’adhère à leurs projets
Quand tu cautionnes leurs saloperies
Leurs lois, leurs expulsions
Et leur amour de la patrie
Certes ils adorent le couscous
Et Chez Khaled
Mais ils flippent que leur fille leur ramène un Mohammed

Fais pas ton étonné,
Ta vierge effarouchée
Ta p’tite chochotte
Qui fait semblant d’être choqué
Genre tu découvre
Que tu vis chez les gros cons
Chez les rastos
Qui n’ont jamais enlevé leur costume de colons

Le racisme est dans nos murs et dans nos livres scolaires
Dans nos souvenirs, dans notre histoire
Dont nous sommes si fiers
Omniprésent,
Il est banal et ordinaire
Il est dans nos mémoires
Et impossible de s’en défaire

Nique la France
Et son passé colonialiste
Ses odeurs, ses relents et ses reflexes paternalistes
Nique la France
Et son histoire impérialiste
Ses murs, ses remparts et ses délires capitalistes

Et toi alors,
Petit socialiste hypocrite
J’ai pour toi quelques rimes
Amèrement écrites
Tu nous as dit que ta cause
Etait celle des sans-papiers
Qu’elle était anti-antiraciste
Tu as promis l’égalité

Tu nous as fait miroiter
Rêver d’une France meilleure
Mais tu triches,
Tu récupères
Comme avec la « Marche des beurs »
Manipulateur,
Tu coures après l’électeur
On t’a démasqué
Toi et ton parti d’usurpateurs

Et y’a nos intellos
Nos p’tits fachos à lunettes
Notre tête à claques,
Comme la conasse de Fourest
Qui propagent, alimentent,
La haine du musulman, du banlieusard
Avec leurs discours stigmatisants

Leurs discours arrogants, insultants et méprisants
Omniprésente leur propagande dans les médias dominants
C’est l’union sacrée
Contre l’envahisseur,
Le barbare, le sauvage,
Contre l’ennemi intérieur

Mais on va pas se laisser faire,
Se laisser bâillonner
On va pas lâcher l’affaire
Comme Eli du LKP

C’est mon devoir d’insolence,
Mon devoir d’irrévérence
Mon devoir d’impolitesse,
Mon devoir de résistance

Nique la France
Et son passé colonialiste
Ses odeurs, ses relents et ses reflexes paternalistes
Nique la France
Et son histoire impérialiste
Ses murs, ses remparts et ses délires capitalistes

 … Sympathique, non ?  En effet, comme le prétendent Les Inrocks, pas la moindre petite trace de haine ou de racisme dans ce texte en réalité bien innocent ! On est effectivement très loin de l’ignominie d’Eric Zemmour et autres consorts néo-fachos. « Petits bourgeois, démocrates républicains, ton pays est puant raciste et assassin »… « Genre tu découvres que tu vis chez les gros cons, chez les rastos qui n’ont jamais enlevé leur costume de colons »… « C’que j’en pense de leur identité nationale, de leur Marianne, de leur drapeau et de leur hymne à 2 balles, j’vais pas t’faire un dessin, ça risque d’être indécent de voir comment j’me torche avec leur symbole écœurant »… License poétique que tout cela ! Il faut bien que l’artiste s’exprime, ma petite dame…

Dans leur pétition, Les Inrocks trouvent donc tout à fait justifié -sans doute même salutaire- de conchier un pays « puant » tout entier, d’insulter on ne peut plus explicitement ses habitants en les qualifiant de « gros cons » à  « culs blancs », et exigent (on y revient) « que les poursuites contre Saïdou et Saïd Bouamama soient abandonnées ». Rien que cela ! Ajoutant un « L’extrême droite veut interdire le droit de chanter la révolte, imposons le droit de l’exprimer sans entraves »… Beau comme de l’antique.

La lecture des premiers signataires de la pétition nous confirme tout de suite que l’on est -évidemment- en très, très bonne compagnie :

Rokhaya Diallo, Houria Bouteldja, Zebda,, Rachid Taha, Mathieu Kassovitz, Olivier Besancenot, Eva Joly, Noel Mamère, Clémentine Autain, Philippe Caubère… La Coordination Nationale des Sans Papiers, le Mouvement des Jeunes Communistes Français (59), le MRAP Lille et Sud-métropole, le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), la Ligue des Droits de l’Homme, le Parti de Gauche, les Indigènes de la République… Que du beau monde, on en conviendra. On se sent immédiatement en famille !

 Mais « serrant contre son cœur les bornes du couillonisme et courant au loin pour agrandir son domaine » (Marcel Pagnol), le magazine d’Audrey Pulvar peut faire mieux, encore, et toujours ! La preuve en a d’ailleurs été fournie à votre serviteur ce lundi 26 novembre au matin, quand il a pris connaissance sur le site des Inrocks de la dite pétition. Pour qu’on ne puisse pas mettre en doute sa bonne foi devant la découverte qu’il y a faite (et qui l’a laissé coi, ce qui n’est pas aisé, toute personne qui le connaît vous le confirmera), l’auteur de ces lignes a aussitôt effectué une saisie d’écran, que vous pouvez donc voir ci-dessous :

Vous avez bien lu : lundi matin à 9 heures 58, la dernière signature dont s’honorait ouvertement en ligne Les Inrocks était celle… de Souad Merah, la sœur de Mohamed Merah, exécuteur de militaires désarmés et d’enfants juifs, celle-là même qui s’est notamment déclarée « fière de (son) frère qui a combattu jusqu’au bout », et qui a aussi dit que « les juifs, tous ceux qui sont en train de massacrer les musulmans, je les déteste ». Avouez que comme caution antiraciste, le journal d’Audrey Pulvar ne pouvait en effet vraiment pas faire plus fort et plus parlant !

Beati Pauperes Spiritu…

 Marc LEROY – La Plume à Gratter

Mots clés : Audrey Pulvar, bienpensance, Les Inrockuptibles, racisme, Saïd Bouamama, Z.E.P.