Politique France

… en émoi

A vrai dire, on ne sait pas trop s’il faut en rire ou en pleurer : il aura donc suffit de quelques mots lâchés par l’ex-locataire de l’Elysée dans une entrevue accordée au journal Valeurs Actuelles pour créer l’émoi dans tout le Landerneau politico-médiatique français. Quelques mots d’une abyssale et surréaliste prétention, d’ailleurs. Je cite : « « Il y aura malheureusement un moment où la question ne sera plus : Avez-vous envie ?  Mais : Aurez vous le choix ?… je ne pourrai pas continuer à me dire : Je suis heureux, j’emmène ma fille à l’école et je fais des conférences partout dans le monde. Dans ce cas, effectivement, je serai obligé d’y aller. Pas par envie. Par devoir. Uniquement parce qu’il s’agit de la France. » Sic. Ne voilà-t-il pas que Pinocchio se prend pour le général de Gaulle ? Que celui qui a menti sur tout, a tout raté ou presque se rêve donc aujourd’hui en une sorte de réincarnation de l’homme qui a su dire non en 1940, et ose se présenter comme le nouveau potentiel sauveur de la France. On a beau s’attendre à tout en matière de culot politique dans notre beau pays, et particulièrement avec ce gaillard, avouez qu’à ce niveau de grand n’importe quoi…

Se sacrifier pour la France, le petit Nicolas ? Il y aurait là de quoi faire rire un bataillon de clowns tristes quand on sait la façon dont il a utilisé sa fonction à son presque seul profit (1, 2)… et ce serait oublier un peu vite le bilan catastrophique, cataclysmique même du Pinocchio élyséen (3). Car en matière de trahison, de désillusion, de ratage, Sarkozy a battu tous les records. En à peine 5 années, il a réussi à trahir à peu près tous ses engagements de campagne (notamment concernant la lutte contre la délinquance, l’immigration, la repentance), à désacraliser comme jamais la fonction présidentielle (du « cass-toi pauv’ con » au fistounet parachuté à l’Epad, en passant par le yacht de Bolloré, le bling-bling et le mariage pitoyable mi-Point de Vue images du Monde mi-Closer avec une ex-mannequin milliardaire de « gôche quoi ! » à la cuisse particulièrement leste), à servir de tragique porte-flingue au consternant BHL en déclenchant presque sur ordre de celui-ci la catastrophique et abjecte opération libyenne, à offrir au final au Parti Socialiste régions, Sénat, Présidence de la République et Assemblée Nationale… Un grand Chelem jusqu’alors totalement inédit dans toute l’histoire de la République, excusez du peu, notez l’exploit et saluez l’artiste.

Mais au diable tout cela ! Aussitôt les médias, bien que détestant le bonhomme, se mettent en branle pour faire de cette non information absolue (qui pouvait douter un instant du désir de l’ex-président de nous faire le coup du grand retour ?) le nouvel alpha et oméga politique du moment… il est vrai qu’on peut essayer de comprendre nos journaleux : lorsque l’on a plus à se mettre sous la dent UMP qu’un François Fillon au charisme d’huître et au courage politique proche du zéro absolu (4), un Jean-François Copé encore plus démago que son modèle sarkozien et dont l’arrivisme et l’opportunisme politique sont tellement aveuglants qu’il en devient carrément inaudible sur à peu près tous les sujets, un Bruno Lemaire ex-europhile béat devenu du jour au lendemain et par pur calcul politique -devant l’effondrement de plus en plus prévisible de son « lendemain qui chante » européiste- un vrai-faux eurosceptique à la Philippe Séguin (plus c’est gros, mieux ça passe pour nos chers médias), ou encore une Nathalie Kosciusko-Morizet et ses gloussements de bécasse qui ressemble de plus en plus à une Marie-Chantal égarée en politique, qui jour après jour se « bachelotise », se « delanoéise » même, en un mot se bobo-gauchise au point de devenir cent pour cent socialo-compatible, on peut comprendre que nos éditocrates en mal de têtes de gondole crédibles à droite se tournent désespérément vers le passé… Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois… mais tout de même !

Et vous verrez : ce qui est encore le plus extravagant dans cette pathétique histoire qui en dit plus qu’un long discours sur le niveau effarant de notre classe médiatico-politique, c’est qu’il y a fort à parier que demain, quand le « grand petit homme » -profitant de la gamelle mémorable qu’annonce déjà la première année pathétique du quinquennat de Flambi 1^er- confirmera son retour sur le devant de la scène pour sauver la France (sic), tous les « ténors » de l’UMP se rangeront comme un seul homme derrière celui qui leur aura en réalité fait subir, en à peine cinq années de présidence, le plus complet, le plus humiliant des échecs. Reste seulement à espérer que les Français, auront, eux, un peu plus de mémoire…

 Marc LEROY – La Plume à Gratter

(1) Sarkozy : côté train de vie, il n’y a pas le feu au lac!

(2) Nicolas Sarkozy et la République « reprochable »

(3) Présidentielles : Nicolas Sarkozy ? Par ici la sortie !

(4) François et le Mariage pour Tous : c’est vraiment « courage, Fillon » !